"Ô étrange Église Orthodoxe, si pauvre et si faible, qui se maintient comme par miracle à travers tant de vicissitudes et de luttes. Église de contrastes, à la fois si traditionnelle et si libre, si archaïque et si vivante, si ritualiste et si personnellement mystique.
Église où la perle de grand prix de l'Évangile est précieusement conservée, parfois sous une couche de poussière. Église qui souvent n'a pas su agir, mais qui sait chanter comme nulle autre la joie de Pâques."
P. Lev Gillet ("Un moine de l'Eglise d'Orient)

09 juin 2007

Saint Columba d'Iona, Apôtre des Scots et formateur de nos ré-évangélisateurs des 7-9ème siècles

splendide icone de saint Columba d'Iona, Pere Orthodoxe
Une des prières de saint Columba:

Tout-Puissant Père, Fils et Saint-Esprit,
Dieu éternel et béni à jamais.
A moi, indigne serviteur, daigne accorder
Que je puisse garder une porte au Ciel.
La plus petite des portes, celle qui est la moins utilisée.
Mais dans Ta maison, O Seigneur,
Afin que je puisse contempler Ta gloire, même de loin,
Et entendre Ta voix, O Dieu, et savoir
Que je suis avec Toi – O mon Dieu.

-oOo-


Un article de Thomas Owen Clancy, conférencier à l'université de Glasgow, département des études celtiques, et coauteur avec Gilbert Márkus du livre "Iona: The Earliest Poetry of a Celtic Monastery" (Edinburgh, 1995).

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Descendant de la plus puissante famille dans le nord de l'Irlande, fondateur de monastères et initiateur des missions vers les Pictes et les Anglais, Columba est sans aucun doute le plus important saint associé aux Églises celtiques.

Les légendes le concernant ont grandit au fil des siècles, et il faut aborder avec circonspection nombre de récits le concernant. Une des plus célèbres le dépeint comme une sorte d'apprenti-sorcier Chrétien, copiant méchamment le précieux Psautier de son maître par la lumière de sa propre main, et par ce fait, faisant éclater une bataille majeure!

De la même manière, des centaines de poèmes, dont certains sont des descriptions fort romantiques de la nature, d'autres de simples versets de dévotion, furent attribués au saint longtemps après sa mort. Cependant, à travers les obscurs brouillards de sa légende, il est possible de retracer le contour de cette figure-clé du début de l'Église gaélique. En fait, de tous les saints Celtiques, il est aussi celui que nous connaissons le mieux, historiquement parlant.

Renard et colombe.
Columba est né de race royale vers 521, dans le nord-ouest du Donegal, en Irlande. Bien que destiné à l'église dès son jeune âge, sa naissance comme noble lui donna compréhension et influence dans le monde politique.

La légende nous dit que son nom original était Crimthann ("renard") et que lorsqu'il fut formé pour être prêtre, il le changea en Columba ("colombe"), et par la suite on l'appellera Colum Cille : "Colombe de l'Église." C'est devenu une sorte de tradition à l'époque moderne de considérer le saint à travers les 2 lentilles de ces noms : l'astucieux renard en chasse, et la pacifique colombe pacifiant autour d'elle.

Il prit apparemment part à une bataille en 561 entre ses proches et lointains cousins; ceci mena à son exil et même à une excommunication temporaire. Cependant son biographe et successeur, Adomnán, regarda les choses différemment, passant sur son excommunication et nous disant seulement que "la seconde année suivant la bataille de Cúl Drebene, alors qu'il était âgé de 41 ans, Columba fit voile de l'Irlande vers la Grande-Bretagne, choisissant de devenir un pèlerin pour le Christ."

Malgré les cadavres dans le placard de Columba, ses efforts en Écosse révèlent un homme qui en avait appris beaucoup en 41 ans, suffisamment pour fonder une série de monastères sur les îles Hébrides intérieures, au large de la côte ouest de l'Écosse. Ce système monastique sera repris par la suite par des ordres tels les Cisterciens et les Chartreux.

Iona, une petite île des Hébrides au large d'une plus grande, Mull, était le centre fertile de ce système. Pour un regard moderne, elle était éloignée de tout, mais Iona était le centre d'anciennes routes maritimes médiévales par lesquelles parvenaient les poteries et de la nourriture de France et de la mer Méditerranée. Cependant, Iona était conçue comme un véritable monastère, un lieu mis à part pour Columba et ses frères.

D'autres monastères insulaires, tels celui sur Tiree, abritait des laïcs y servant à titre de pénitence pour leurs péchés. Une autre île abritait des moines plus anciens, plus expérimentés, qui y vivaient comme de saints anachorètes.

Iona formait des prêtres et des évêques, et la réputation d'érudition de Columba était grande lorsqu'il mourut (bien que nous ne possédions plus que peu de ses propres oeuvres). D'iona, des prêtres et des moines partirent au loin, fondant des églises en Écosse et cherchant "des déserts sur l'océan" (des îles isolées et lointaines).

Puissant moine.cheval sympathisant avec saint Columba d'Iona
La légende de Columba nous donne un avant-goût tant du renard que de la colombe. La Vie de Columba, par Adomnán, fourmille d'histoires où Columba parle avec des Anges, envoie un Ange sauver un moine qui tombe d'un toit, est battu par un Ange pour le convaincre d'obéir au choix de Dieu (plutôt qu'au sien) pour le choix d'un roi pour la colonie gaélique en Écosse.

Il est présenté comme ravi en contemplation, voyant "d'un esprit miraculeusement élargit... l'orbite entière du globe terrestre et la mer et le ciel qui l'entoure." De ces visions, il proclame des prophéties, envoie des moines pour aider des gens en détresse, ou prie pour revigorer ses moines épuisés travaillant aux champs.

En matière de rois, Columba s'en tient à ses propres idées. Bien qu'il prie pour le succès militaire des rois que Dieu a choisis, il discute leur choix avec les Anges. Il affronte par sa puissance le roi des Pictes, l'écrasant de Psaumes bruyants, défonçant ses lourdes portes en chêne, et repoussant la magie des druides du roi. Il bat même des animaux sauvages : un féroce sanglier tombe raide mort, et un étrange monstre sur le Loch Ness s'enfuit face à sa puissance.

Bien que la puissance de Columba soit souvent dépeinte d'une manière imagée, son influence était en fait la clé de sa victoire sur les rois de l'Écosse gaélique, et ses pouvoirs légendaires étaient suffisamment célèbres pour que ses moines, par la suite, parviennent à convaincre les Pictes de se convertir.

Après sa mort, la puissance politique et militaire de Columba devint un élément-clé de son culte. Ses reliques furent emportées à la bataille par de petits chefs Irlandais et des rois Écossais – une de ses reliques précédait l'armée écossaise lors de sa victoire à Bannockburn en 1314.

Des décennies après sa mort, une apparition particulière au roi anglais de Northumberland fut décisive dans l'histoire du Christianisme en Grande-Bretagne. Ce roi était Oswald, qui avait été élevé en exil sur Iona. Alors qu'Oswald livrait la bataille par laquelle il allait assurer sa royauté, Columba apparu en grand au dessus du champ, promettant la victoire, une apparition qu'un auteur moderne a comparée à Batman survolant Gotham City. En 635, Oswald envoya des missionnaires d'Iona pour renouveler par leur sobriété monastique et leurs bonnes oeuvres le Christianisme du Northumberland, qui était occupé à vaciller.

Succès posthumes.croix orthodoxe Picte
Columba était un poète, un très grand érudit, un fondateur de monastères et un chef, un ecclésiastique visionnaire. A l'époque de sa mort, le 9 juin 597, il était déjà célébré.

Bien qu'il fut plus un moine qu'un missionnaire, Columba fonda des églises en Écosse, et ces dernières, avec le temps, se mirent à évangéliser Pictes et Angles. L'héritage des monastères qu'il a fondés, qui se ressourçaient sans cesse dans l'inspiration de leur saint patron, ont grandement multiplié l'influence de l'homme en lui-même. De manière appropriée, à la fin de la Vie, Adomnán présente son héros gravissant la petite colline près du monastère sur Iona, et de là déclarer :

"Cet endroit, bien que petit et sans importance, sera grandement honoré par les rois et les peuples d'Irlande, et aussi par les dirigeants de nations barbares et étrangères avec les tribus qui leur sont soumises. Et les saints d'autres Églises le révéreront aussi grandement."

Une des manières dont l'influence de Columba se fit sentir après sa mort fut la Loi des Innocents, promulguée par Adomnán en 697. Cette loi veillait à la protection des non-belligérants (dans une société largement militarisée) et des femmes (en danger face aux violences domestiques, aux habituels abus, et aux épouvantables conditions de vie et de travail).

La Loi d'Adomnán imposait de sévère punitions aux offenseurs. C'est une étape décisive dans l'histoire de la législation.

Adomnán rapporte nombre de récits de Columba où il le présente comme protecteur des innocents, et ces récits renforcent le grave message sous-jacent à sa Loi. Dans le plus célèbre, Columba était encore jeune garçon, étudiant dans un pré avec son tuteur. Paraît une jeune fille, poursuivie par un vicieux voyou, qui la transperce aux pieds mêmes des clercs. Horrifié, le tuteur s'écrie "Combien de temps, Columba, mon saint fils, Dieu le Juste Juge va-t'Il laisser ce crime et ce déshonneur impunis?" Columba appela la colère de Dieu sur le meurtrier, qui s'effondra raide mort.

Il est difficile de résumé tous ses accomplissements, mais une sentence commémorative composée après son décès y parvient mieux que la plupart :

"Il était un pilier d'érudition en tout domaine,
Il fut éminent dans le livre de la difficile Loi.
La terre du nord s'éclaira,
Les peuples de l'ouest furent enflammés,
Il illumina l'est avec de chastes moines."

monastere de saint Columba, abbe Orthodoxe et Pere de l'Eglise, ile d'Iona, Hebrides*-*-*-*-*-*-*-*


Paroisse Saint-Columba, archidiocèse grec-orthodoxe antiochien d'Amérique, vicariat de rite orthodoxe occidental - page explicative de leur Icône de saint Columba avec scènes de vie
http://www.stcolumbachurch.org/icon_details.html



Règle de saint Columba d'Iona, en français.


Liens & articles & prières de / sur saint Columba (et autres saints du jour)
http://www.amdg.be/sankt/jun09.html

Vie & héritage, par l'archimandrite John (Orthodox Outlook, traduction fr)
http://www.amdg.be/sankt/columba1.htm

Vie, iconographie, etc
http://www.amdg.be/sankt/columba1.html


reliquaire de saint Columba d'Ionareliquaire de saint Columba

Comment se débarasser du tabagisme – succès garanti, très faible coût


Nombre de gens venaient au père Païssios avec des questions comme celle-ci.
- "Père, je fume et je ne parviens pas à m'arrêter. Que dois-je faire?"

- "Est-ce que tu veux vraiment arrêter?"

- "Oui, parce que j'ai souvent essayé de le faire."

- "Oké. A partir de cet instant, ne fume plus, et Dieu t'aidera."

- "D'accord, Père, mais peut-être que..."

A ce moment-là, le père Païssios interrompait toujours son interlocuteur d'une voix tranchante mais confiante :

- "Il n'y a plus de 'peut-être' qui tienne. C'est terminé! Nous sommes libres et indépendants. Si une passion contrôle notre vie, c'est parce que nous le lui permettons. Nous sommes esclaves de notre esclavage, parce que nous aimons cet esclavagiste. Aussitôt que nous aspirons avec zèle après notre liberté spirituelle, et que nous voulons par dessus tout obéir au Christ, nous sommes libérés de nos passions et devenons serviteurs de Dieu. Le Christ a donné tous les Commandements aux pécheurs. Il leur a dit de prendre leurs distances d'avec le péché, et de Le suivre. C'est pourquoi Dieu interdit au voleur de
film LE PARI, par les Inconnus, ou comment cesser de fumer dans la joie et la bonne humeur voler, au fraudeur la malhonnêteté, et l'adultère à l'adulte. Pourquoi Dieu nous demanderait-Il de tourner le dos au péché et de Le suivre si cela était impossible? Il nous dit de le faire parce que nous devons déterminer si nous maîtrisons nos passions ou si nous voulons en rester esclaves. Dès lors que nous les détestons, et que nous tournons tout notre amour vers Dieu, aussitôt nous sommes libérés. Il est de la plus haute importance de nous rendre compte de notre 'maladie' (à savoir prendre conscience de quel côté est cette mauvaise maladie) et la détester. Et choisir la guérison, que nous obtiendrons à l'instant même."

p. Païssios de la sainte Montagne,
édition NL du monastère de Pervijze, pages p.49-50


08 juin 2007

Moissons, foi et élections

"N'est-ce pas maintenant la moisson du blé? Je vais invoquer le Seigneur, et il va faire tonner et pleuvoir. Vous comprendrez alors que vous avez mal agi à ses yeux en demandant un roi." (1 Samuel 12,17)

Ce verset tombe bien, car le 8 juin, c'est la fête de saint Médard, le très Orthodoxe évêque de Tournai & Noyon, qui est bien connu en matière météorologique. Et hélas uniquement dans ce domaine-là.
Maintenant, à bien le relire en entier, que doit-on dire dans nos pays, où après avoir chassé Dieu, on a coupé la tête des rois, ou on les a "castrés" en les privant de tout rôle réel, surtout s'ils avaient quelque velléité de le faire de manière + ou – chrétienne?! Et on nous invite à voter pour des gens qu'on ne voit jamais à l'église, comme si un tel choix était possible?! Je me permet de vous suggérer de relire au plus vite, ce que le père Païssios l'Athonite disait à cet égard : Foi & élections, comment faire l'unique bon choix possible

"Un jour de sabbat, Jésus traversait les champs, et ses disciples arrachaient des épis et les mangeaient après les avoir froissés dans les mains" (saint Luc 6,1).
Car ici, depuis si longtemps, et on en voit les fruits d'ivraie chaque jour possible, les épis du fruit spirituel de la bonne semence se font toujours plus rares. Et les disciples deviennent presque des antiquités, quel que soit leur âge.

Seigneur, sauve Ton peuple et bénis Ton héritage!


07 juin 2007

Diacre Benjamin: Le Rite Orthodoxe Occidental n'est pas de l'uniatisme inversé (AWRV)


Un des aspects les plus rudes, un des plus grands défis auxquels le Rite Orthodoxe Occidental (R.O.O) doit faire face, c'est le nombre d'idées fausses que les gens charrient à propos du R.O.O. L'une d'entre elles, c'est que le Rite Orthodoxe Occidental ne serait qu'une sorte d'uniatisme inversé. L'uniatisme, c'est ce procédé qui a créé les églises catholiques-romaines de rite byzantin (ou "rite oriental"), avec des hiérarchies en communion avec le pape de Rome qui acceptent officiellement la théologie catholique-romaine mais conservent leur propre liturgie et coutumes [A].

A première vue, la comparaison entre l'Orthodoxie Occidentale et les "Catholiques Orientaux" semble naturelle: ce sont tous deux des minorités au sein d'Églises bien plus grandes; toutes deux cherchent à préserver leur patrimoine liturgique contre l'assimilation; toutes deux sont bien souvent incomprises par les autres dans leur Église. Cependant, ces similitudes masquent nombre de différences profondes. Cette accusation "d'uniatisme inversé" lancée par des Orthodoxes "de souche" et parfois par des polémistes catholiques-romains est fausse pour au moins 4 raisons :

* L'Orthodoxie de Rite Occidental n'a jamais et en aucune manière influencé des candidats potentiels à la conversion avec des considérations politique, sociale ou économique.
* Elle n'amène pas la pratique contemporaine et inchangée d'une autre communion au sein de l'Église.
* Théologiquement, elle n'est en RIEN distincte de l'Orthodoxie "orientale."
* Elle ne croit pas qu'elle a un "rôle unique" ou "une mission spéciale pour promouvoir l'unité de tous les Chrétiens" au-delà de ce qui a été enjoint à tous les Chrétiens.

Il est bon d'examiner chacun de ces points en détail.

Conversion sans coercition. La plus grande plainte des Églises Orthodoxes à propos des églises catholiques-romaines byzantines, tant à l'époque de leur formation que de nos jours, c'est que ces groupes de "prosélytisme" utilisent des considérations économiques, sociales ou politiques afin d'attirer des fidèles. De tels facteurs ont joué un rôle-clé dans l'union de Brest-Litovsk en 1596, qui fonda l'église catholique-romaine byzantine en Ukraine. La royauté polonaise exerça des pressions sur les Orthodoxes pour qu'ils se convertissent, et les missionnaires Jésuites insistèrent sur les "avantages politiques qui devaient s'accumuler pour...
uniatisme, politique et pseudo-eglise l'Église Orthodoxe... suite à une union avec Rome." Et de fait, les évêques Ukrainiens qui s'adressèrent à Rome déclarèrent "Nous devons faire cela pour des raisons précises, sérieuses, pour l'harmonie de la république chrétienne (Pologne), afin d'éviter plus de confusion et de discorde." Les pressions ecclésiales internes ont aussi contribué à la décision. Ainsi donc, les Uniates devinrent soumis à la papauté romaine par un processus qui semble bien moins enraciné dans la théologie que dans l'économie financière et la politique. De plus, d'après les Orthodoxes, de nos jours, les Uniates offrent des avantages dans les domaines de l'éducation, des cours, ou des soins de santé meilleur marché pour leurs membres, un délicate tentation pour les Orthodoxes, en amenant à quitter l'Église.

En laissant pour le moment la question de sa propriété, concluons que c'est assurément sans parallèle avec le Rite Occidental. Pour le dire de manière euphémique, les Orthodoxes Occidentaux ne reçoivent aucun avantage financier, politique ou social du fait de leur entrée dans l'Église. Il n'existe pas même un réseau de fourniture d'emploi genre "Coming Home Network" pour ceux qui souhaitent entrer dans l'Orthodoxie (de quelque Rite que ce soit). En fait, le clergé de R.O.O nouvellement ordonné doit bien souvent renoncer à son salaire, son assurance-maladie, ses titres ecclésiastiques, ou la respectabilité auprès des anciens collègues du club local pour avoir abandonné une confession pour gens aisés et avoir embrassé la véritable Foi. Ils suivent bien ce que le Christ a dit: "quiconque aura laissé pour Moi, maisons, frères, soeurs, père, mère, enfants, ou terres, recevra le centuple et possédera la vie éternelle" (saint Matthieu 19,29). Bien que nous élevions de ferventes prières pour que viennent les bénédictions sur le Rite Occidental, le servir reste un chemin de Croix, et nous n'avons rien d'autre à offrir à ceux qui l'entreprennent que la pureté de notre foi et la ferveur de notre dévotion.

Orthodoxe dans la Liturgie. Quand les évêques Ukrainiens approchèrent le Vatican en 1596, ils demandèrent que leurs "culte divin et toutes les prières et offices de Matines, Vêpres, et les Vigiles, puissent rester intacts (sans aucun changement) pour nous selon l'ancienne coutume de l'Église d'Orient" et que leur Divine Liturgie soit préservée "éternellement la même et intangible." La promesse leur fut faite, et les fidèles furent autorisés à réciter le Credo de Nicée sans le "filioque", à ordonner des prêtres mariés, et à célébrer leurs offices comme ils
mgr Kallistos Ware, L'Orthodoxie, Eglise des 7 Conciles l'avaient toujours fait. (Cette tolérance sera abandonnée par la suite, et une intense latinisation s'ensuivra) (1). Pour le dire autrement, les pratiques des catholiques-romains de Rite Oriental ne différaient en rien des pratiques Orthodoxes Orientales. Dans son livre "L'Église Orthodoxe", l'évêque Kallistos Ware écrit (p.125) : "On se demande jusqu'à quel point les paysans illettrés comprirent de quoi il était question." "Nombre d'entre eux, à un moment ou l'autre, expliquèrent la chose en disant que le pape de Rome avait à présent rejoint l'Église Orthodoxe."

On ne peut dire cela du Rite Occidental, dont les pratiques liturgiques détonnent tant par rapport à la messe Novus Ordo catholique-romaine et le Livre de Prières Publiques anglican de
saint Jean Maximovitch celebre une Divine Liturgie Orthodoxe occidentale avec du clerge Orthodoxe occidental 1979. (Ironiquement, nous sommes aussi souvent critiqués pour cela). Notre Liturgie de saint Grégoire le Grand préserve l'ancien héritage de la Tradition latine, alors que la Liturgie de saint Tikhon (fichier texte) se conforment intégralement aux Observations Russes de 1904 sur le Livre de Prières Publiques américain. Aucun des 2 ne sont contemporains des pratiques d'une grande dénomination (2). De plus, même avant Vatican II, la Liturgie de saint Grégoire avait été restaurée pour être conforme aux directives Orthodoxes (notablement par l'insertion d'une épiclèse "descendante" et l'ajout de prières d'avant la Communion). Une des caractéristiques est aussi que la Messe est célébrée en langue vernaculaire. Bien que des visiteurs pourraient se trouver fort familiers avec certains éléments et la structure générale de notre Messe, aucun d'entre eux ne pourrait traverser la rue et voir une image miroir de l'office d'une autre dénomination (à moins que cette dénomination ne nous imite!).

Orthodoxe dans la théologie. Bien que les catholiques-romains de rite byzantin doivent officiellement accepter tous les dogmes et doctrines de l'église catholique-romaine, il y a toujours été entendu que les "CathByz" mettraient "l'accent" sur leur propre théologie, orientale. Les catholiques-romains de rite byzantin discutent des tensions qu'ils ressentent suite à cela.

Le Rite Orthodoxe Occidental ne possède pas une approche unique ou différente par rapport à la théologie de nos frères Orthodoxes Orientaux. Bien que nous regardons avec une compréhensible affection vers nos ancêtres tels que le pape saint Grégoire le Grand, saint Ambroise de Milan, saint Bède le Vénérable et saint Pierre Chrysologue, nous plions aussi le genoux devant saint Syméon le Nouveau Théologien, saint Grégoire Palamas ou saint Jean de Cronstadt. Nous ne différons en rien. Nous sommes simplement des Chrétiens Orthodoxes qui célébrons avec une Liturgie occidentale, approuvée, qui exprime tant la théologie Orthodoxe que notre héritage occidental.

Une colonne, non pas une pont. Les catholiques-romains de rite oriental ont longtemps crû
les uniates, porteurs de valises du faux christianismequ'en tant qu'église orientale au sein de la communion catholique-romaine, ils bénéficiaient d'une position unique et spéciale en tant que "pont" vers l'Orthodoxie. A un point plein d'espoir et d'imagination, cette ligne de raisonnement a vu en ces catholiques-romains de rite byzantin les premiers fruits d'une chrétienté réunifiée, ouvrant la voie pour défaire le grand Schisme. Et à vrai dire, bien souvent, ils se qualifient eux-mêmes "d'Orthodoxes en communion avec Rome", un qualificatif qui est très déroutant. Cependant, cette vision a depuis lors été abandonnée par la hiérarchie catholique-romaine. Il y a plus d'une dizaine d'années, la Déclaration de Balamand a formellement déclaré que "l'uniatisme ne pouvait plus être accepté ... comme un modèle pour l'unité que nos églises recherchent."

Au sommet de nos espoirs, le rêve Orthodoxe Occidental que des dénominations entières accepteront la Foi Orthodoxe, dans le Rite Oriental ou dans un des Rites Occidentaux approuvés. Nous prions pour cela. Et cependant, nous ne nous considérons pas comme un "pont" vers la papauté romaine (d'ailleurs il ne nous appelle pas). Et nous ne nous voyons certainement pas comme des "catholiques-romains (ou anglicans ou vieux-catholiques) en communion avec l'Orthodoxie." Nous sommes Orthodoxes, tout simplement, et notre intérêt pour ceux des autres dénominations ne viendra que lorsqu'eux aussi auront embrassé la Foi Orthodoxe. Nous ne sentons pas tant avoir quitté notre patrie que d'en fait l'avoir enfin trouvée. Nous ne souhaitons pas en être distincts, et quand bien même nous célébrons des liturgies différentes de celles des autres dans notre communion, elles expriment la même théologie, et souvent d'une même manière avec parfois presque les mêmes paroles (voyez ici par exemple, etc). Pour être bien clair : les catholiques-romains de rite byzantin semblent regarder principalement hors de leur communion avec l'Église Orthodoxe pour trouver de l'inspiration (y compris des saints d'après 1569, ou la date appropriée de l'union avec Rome); dans le Rite Orthodoxe Occidental, nous, nous cherchons principalement au sein de notre communion. Nous ne sommes pas un pont. Nous sommes un pilier de l'Église que nous aimons. Ayant nombre d'amis et de connaissances dans le catholicisme-romain byzantin, cela m'attriste de les voir aspirer tant après une église à laquelle ils n'appartiennent pas.

Autres arguments. Il est vrai que le Rite Orthodoxe Occidental ne possède pas d'évêques et hiérarchies séparés, comme en ont les catholiques-romains byzantins, et certains ont utilisé ceci comme argument pour nous distinguer. Bien que je reconnaisse la différence, je ne trouve pas ça fort convainquant. Tout d'abord parce qu'à la réintroduction du Rite Occidental dans ce pays [USA; ndt], il avait son propre évêque : Ignatius Nichols. Ca ne représenterait pas un grand pas en arrière si nous devions à nouveau en avoir un. Bien plus important, il ne faudrait pas considérer tout groupe ayant une hiérarchie extra-géographique comme "uniate"; cette logique mènerait à la ridicule conclusion que les Roumains, Bulgares, et Albanais qui dépendent de l'Église Orthodoxe d'Amérique (OCA) seraient à considérer comme "uniates", ce qu'ils ne sont assurément pas (et l'archevêque Nathaniel est une source d'inspiration pour nous tous!)

Là où nous sommes cependant semblables. Nous partageons une similitude vitale avec les catholiques-romains de rite byzantin : nous aussi, nous croyons que notre témoignage rendu à la foi de notre héritage de minorité (occidentale dans notre cas) enrichit notre Église, en démontrant qu'elle n'a pas été fondée rien que pour un groupe de gens ou une ethnie, ni qu'historiquement parlant, elle ne s'est exprimée par une unique pratique liturgique (Je reviendrai peut-être plus en détail sur ce point une autre fois). Nous croyons que l'Église Orthodoxe est la véritable Église (cfr Khomiakov), et qu'elle reconquiert à présent son arrière-plan occidental. Les catholiques-romains byzantins croient que le pape de Rome est le successeur de saint Pierre, que tous doivent être en communion avec lui, et ils expriment cette théologie à leur manière. C'est un autre problème pour un autre jour, mais tout Chrétien de quelqu'origine que ce soit peut acquiescer avec ceci : l'Église du Christ n'a jamais été voulue pour n'être qu'Orientale ou Occidentale, mais Catholique et universelle, d'un bout à l'autre de la terre.

Un important addendum. Pour finir, je suis bien conscient que la discussion ci-dessus tourne surtout autour des origines des églises gréco-catholiques, et peut-être d'incidents du genre dans d'autres pays (où l'appartenance peut valoir des intérêts matériels). Certains polémistes extrêmes parlent aujourd'hui des "uniates" à Pittsburgh et Passaic (USA), comme s'il s'agissait de pions ignorants dans un jeu de marionnettes politique dans l'Ukraine du 16ème siècle. Les catholiques-romains byzantins modernes sont surtout des familles qui le sont depuis des générations et de plus, depuis Vatican II, un nombre non-négligeable de catholiques-romains de rite latin fuient l'anarchie liturgique qui a germé durant ce "Nouveau Printemps" (d'où cette abondance de Melkites Irlandais et autres Ruthènes Italiens). Il faut le dire ainsi, nombre sont membres de la communion catholique-romaine par volonté propre.

Puissions-nous tous prier pour le jour où nous serons membres de la même Église, et l'ergoterie pour savoir qui est ou n'est pas un "uniate" aura disparu, dispersé et fondu par la lumière aveuglante de Son visage.

Notes finales :
1. La latinisation a eu lieu dans les vieux pays, mais s'est intensifiée en Amérique du Nord. L'hostilité ouverte à l'existence du rite byzantin inspira saint Alexis Toth, de Wilkes-Barre, d'amener son peuple à l'Orthodoxie. Pendant ce temps, parmi les catholiques-romains de rite oriental, la promesse de clergé marié fut annulée; une "messe basse" parlée fut introduite; des autels latéraux érigés; les formes latines de confession remplacèrent la byzantine; et la récitation du rosaire, l'adoration du saint-sacrement, et d'autres pratiques catholiques-romaines occidentales se répandirent.


2. C'est aussi vrai dans le cas des liturgies de Rite Occidental utilisées dans l'Église Orthodoxe Russe Hors Frontières : la Liturgie Anglaise et la Liturgie de Sarum. Il ne faut cependant pas confondre cette dernière avec le soit disant "Old Sarum Rite Missal," qui a été composé à l'origine dans un monastère non-canonique aux forts liens avec la "Gnostic Orthodox Church" et un arrière-plan de Théosophie.

Diacre Benjamin Johnson (AWRV)

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Notes de traduction
[A] Cette conservation des rites et coutumes n'est en effet que la théorie de départ. Et on se demande comment certains on pu y croire de bonne foi. Car, en pratique, comment concilier un Credo falsifié avec un non-falsifié dans une même liturgie? Comment concilier des hérésies condamnées (notamment par les papes de Rome au premier millénaire, anathémisant de facto leurs pseudo successeurs!!) avec la pure théologie de l'Église? Comme l'ont montré toutes les études, y compris réalisées au sein du catholicisme-romain, c'est systématiquement qu'ils parviennent au fil du temps à ce que seul le "vernis" culturel persiste, le coeur même de la théologie étant falsifié à son tour. Je n'invente rien, saint Alexis Toth l'a bien expliqué, lui qui provenait justement du milieu uniate.

[B] Pour rappel, une grande organisation Orthodoxe en Russie appelait pourtant à faire usage du Rite Occidental comme outil de "contre-uniatisme", ce qui serait somme toute justice. Mais la tentation d'union "à n'importe quel prix, y compris en rabaissant la Foi", tentation bien visible chez divers prélats de diverses de nos juridictions, fait comprendre que l'espoir de ce groupe en Russie, ainsi que des Orthodoxes Occidentaux non-convertis à la culture orientale, risque de rester un espoir hélas sans lendemain. Le Rite Orthodoxe Occidental est en effet LE "casus belli" par excellence. Parce que lui seul pourrait rendre aux Occidentaux l'accès à la véritable Foi de leurs ancêtres dans la Foi, d'avant le Schisme donc. On comprend tout l'intérêt pour l'Église, stratégique si on peut dire. Et tout le danger pour les groupes hors de l'Église, qui règnent pourtant en maîtres chez nous.

A (re)lire, l'appel de Moscou pour le Rite Occidental :
Collaborer ou rompre avec le Vatican? Un appel Russe au contre-uniatisme!


06 juin 2007

P. Jean Breck: pourquoi pas "l'inter-communion"?


En particulier au moment de Pâques (Pascha), des Chrétiens non-Orthodoxes nous demandent pourquoi ils ne peuvent pas recevoir la Sainte Communion dans les paroisses Orthodoxes. Aussi douloureux que soit ce refus, il est basé sur notre compréhension de la véritable signification du Sacrement, telle que révélée par l'Écriture Sainte et l'expérience ecclésiale.

Il y a quelque mois, quelqu'un m'a transmis un article d'un site internet qui traitait du problème de la Communion parmi diverses confessions chrétiennes. Répondant à la question du refus de donner le sacrement à une Protestante, à Pâques, dans la paroisse catholique-romaine de son petit ami, l'auteur déclarait que les non-catholiques-romains ne croyaient pas dans "la présence du corps de Dieu dans l'hostie après transsubstantiation." Dès lors, "ils ne peuvent pas prendre la communion."

Et l'auteur d'ajouter: "Il n'existe qu'une exception à cette règle. Les Chrétiens Orthodoxes (tels que les Chrétiens Grecs Orthodoxes) peuvent prendre la communion dans toutes les paroisses catholiques-romaines. La raison est que le Christianisme Orthodoxe enseigne aussi la présence réelle de Dieu dans l'hostie."

Cette manière d'envisager le problème, bien que fort répandue, n'est cependant pas exacte, et elle requiert plusieurs mises au point, tant théologiques que pastorales. On pourrait écrire un volume entier pour expliquer tout cela, mais voici quelques uns des éléments les plus importants. Au cours des 2 articles à venir, nous en explorerons quelques autres.

En premier lieu, il nous faut reconnaître que nombre de Protestants (en ce compris nombre d'Anglicans) croient en fait que la sainte Communion leur offre une véritable participation au Corps et Sang du Christ. Ils peuvent ne pas exprimer leur croyance comme les catholiques-romains ou les Orthodoxes le voudraient; mais leur foi dans la "présence réelle du Christ dans l'Eucharistie" est authentique et ne devrait pas être dénigrée ou niée.

Ensuite, la théologie eucharistique Orthodoxe n'explique pas le changement du pain et vin en Corps et Sang du Christ comme un résultat d'une sorte de "transsubstantiation.", cet enseignement disant que les propriété visibles des éléments restent inaltérées, alors que leur "substance" ou essence interne devient actuellement Corps et Sang. La tradition Orthodoxe parle d'un "changement" ou d'une "transformation" – "metamorphôsis", dans la prière eucharistique de la Divine Liturgie cela donne "metabalôn", "en les changeant" – mais toujours avec le souci de préserver le mystère de l'exploration de la raison humaine. Elle parle aussi du Corps et du Sang du Christ glorifié, expliquant clairement que notre communion est en l'être personne du Seigneur Ressuscité et Exalté, et non pas dans la chair et le sang de Jésus incarné, brisé et répandu sur la Croix. Le Jésus incarné et le Christ ressuscité sont bien sûr une seule et même Personne – "Jésus-Christ est Seigneur," déclare saint Paul en Philippiens 2,11. Mais notre communion est dans la réalité radicalement transformée du Christ Ressuscité, Qui est monté aux Cieux et qui Se rend accessible à nous par la présence et l'inhabitation du Saint Esprit au sein de l'Église.

Un autre point doit être mis en exergue. Il est vrai que les Chrétiens Orthodoxes sont considérés par certains prêtres catholiques-romains comme étant dans les conditions requises pour recevoir la communion dans leurs paroisses; mais cette pratique n'est pas officiellement admise par la Congrégation pour la Doctrine de la Foi (Saint Office ou Magisterium) [1]. D'un autre côté, les Églises Orthodoxes, unies par dessus tout par leur foi et pratique Eucharistique, n'acceptent à la communion que les baptisés Chrétiens Orthodoxes, et encore, elle n'est prévue que pour ceux qui se sont préparés par la prière, par une jeûne approprié et – dans la plupart des traditions – par la confession des péchés. De plus, les évêques Orthodoxes et autres docteurs ont clairement stipulé aux fidèles qu'ils ne savent correctement recevoir la communion que d'un prêtre ou évêque canoniquement ordonné, dans le contexte d'une Divine Liturgie Orthodoxe traditionnelle (ce qui inclut la communion portée aux malades).

Cependant, il n'est pas suffisant de déclarer que les Orthodoxes n'enseignent pas une "transsubstantiation." (malgré que le terme apparaisse dans certains de nos livres liturgiques) et, si ils sont fidèles à leur tradition, ne reçoivent pas la communion hors de leur propre Église. Il y a aussi le problème crucial "d'identité ecclésiale." Nul Chrétien Orthodoxe ne reçoit la Sainte Communion en étant isolé. Nous sommes incorporés dans une communauté universelle d'humains, tant vivants que défunts, que la foi et la pratique commune unissent en l'Église Une, Sainte, Catholique et Apostolique. Notre existence dans le Corps du Christ, notre identité ecclésiale en tant que Chrétiens Orthodoxes, est telle que nous représentons l'Église en tout ce que nous sommes et faisons. Si je défie les décrets de ma tradition ecclésiale et je reçois la communion dans une autre église, ou comme prêtre j'invite un non-Orthodoxe à venir recevoir l'Eucharistie dans ma paroisse, j'agis en violation de ma propre tradition, à laquelle je me suis consacrée devant Dieu. Et du fait de ma solidarité avec tous les autres membres de l'Église Orthodoxe, je suis les implique implicitement dans mon acte de désobéissance.

Le fond du problème n'est cependant pas une question d'obéissance ou de désobéissance à des règles et dispositions. Si les Orthodoxes préservent la sainteté de l'Eucharistie comme une obligation suprême, c'est à cause de cette vérité souvent exprimée que la communion au Corps et Sang du Christ est la fin même ou l'accomplissement de l'existence Chrétienne. Elle ne peut pas, par exemple, être réduite à un moyen par lequel parvenir à "l'unité chrétienne" - en tout cas, l'histoire de l'Église a clairement montré que le partage de la communion entre églises aux enseignements théologiques contradictoires n'a jamais amené à une unité durable.

L'Eucharistie est la vie elle-même. Elle est la vie du Christ qui nous permet de vivre notre vie en Christ. Participer à l'Eucharistie comme nous sommes appelés à le faire, cela requiert notre acceptation d'une position doctrinale et d'un engagement qui est spécifiquement "orthodoxe", enraciné dans les Écritures et transmis à travers les âges sous la guidance et l'inspiration du Saint Esprit. Cela requiert de même l'acceptation d'une disciple ascétique, qui comporte la prière personnelle, la célébration liturgique, le jeûne, la confession des péchés, et des actes de charité: les ingrédients d'une vie de repentance et d'une quête incessante de la sainteté. Et cela requiert que nous honorions notre "identité ecclésiale" particulière, en plus de la soumission à l'autorité ecclésiale représentée avant tout par nos évêques: des personnes canoniquement ordonnées et établies, qui sont appelées par leurs actions et enseignements à préserver et à transmettre la vérité de la Foi Orthodoxe tout en maintenant un lien d'unité au sein du Corps du Christ. Une unité qui n'est pas enracinée dans le pouvoir, mais dans le respect mutuel et l'amour fraternel, partagés par tous les membres de l'Église.

Dans cette perspective, "l'inter-communion", l'accueil de non-Orthodoxes pour partager la célébration Eucharistique, n'est simplement pas possible sans miner la signification même du Sacrement. Cela n'implique pas un jugement particulier sur les offices eucharistiques d'autres églises. Cela reconnaît plutôt que pour les Orthodoxes, la Divine Liturgie est ce que son nom implique. Elle est à la fois le moyen et la fin de l'existence Chrétienne, une existence qui résulte de la Foi Orthodoxe, de la repentance continuelle, de la discipline ascétique, de l'identité ecclésiale, et des oeuvres de charité. A ceux qui acceptent cette "Voie Orthodoxe", l'Eucharistie offre une véritable participation à la Vie même du Christ Ressuscité et Glorifié, de même qu'elle offre le pardon des péchés, la guérison de l'âme et du corps, et un avant-goût du Banquet céleste dans la présence éternelle de Dieu.
P. Jean Breck


L'archiprêtre Jean Breck a été professeur de Nouveau Testament et d'Ethique au Séminaire Saint-Vladimir et est actuellement professeur d'Exégèse Biblique et de Bio-éthique à l'Institut de théologie Orthodoxe Saint-Serge à Paris, France. Avec son épouse, Lyn, il est le directeur du centre de retraite Saint Silouane en Caroline du Sud.

SAINT SILOUAN RETREAT CENTER
Orthodox Church of America
6102 Rockefeller Rd.,
Wadmalaw Island, SC 29487, USA
Tel. : (843) 559-1404
Centre recommandé au clergé par le Saint-Synode de l'OCA en 1998
Saint



Note de traduction :
[1] Cette "Congrégation pour la Doctrine de la Foi" est un des principaux départements de l'État du Vatican; elle était anciennement appelée "Saint Office", et avant ça, "(sainte) Inquisition";
après la suppression de l'Inquisition en Espagne, en 1820, il y a eu changement de nom et un peu de méthodes, mais pas de but.

05 juin 2007

Aimer un enfant autiste


Posté le jeudi 12 avril 2007 dans la rubrique "Christian Life, Marriage and Family"
[Beliefnet, 13 Avril 2007]

L'été dernier, c'est avec toute une maisonnée que nous avons été à la plage, avec nos enfants et leurs conjoints et nos 7 (et bientôt 9) petits-enfants. Les cousins ne se voient pas souvent, aussi ils ont pataugé et couru et crié, le vent éparpillant leurs voix. Mais Adam, 4 ans à l'époque, resta seul. Marchant sur le sommet des dunes, tournant autour de la famille comme un satellite silencieux. L'année dernière, Adam a été diagnostiqué comme atteint d'autisme.

Adam est un magnifique enfant avec une peau crème-rose et des yeux bleus clairs. Il n'avait pas encore 2 ans quand, lors d'une fête de jardin, il était allé vers les voitures parquées dans le jardin et avait commencé à lire à voix haute les marques d'immatriculation, épelant chiffres et lettres. Nul ne le lui avait appris. Il avait développé une fascination pour l'alphabet, les mot et les chiffres, les cartes et la mappemonde, et tout dessin répétitif (il aime les images de M. C. Escher). Lorsqu'il fut évalué à l'âge de 3 ans et demi, son niveau cognitif était celui d'un enfant de 7 ans. Depuis les jours où il était encore bébé, Adam nous avait surpris en exprimant des choses que nul ne se souvenait lui avoir appris, et c'était assez déroutant. Je continuais de penser que nous allions retrouver un billet de l'université de Phoenix dans son lit d'enfant.

Mais quant à parler – c'était différent. Quand Adam commença à essayer de parler, l'effort fut visible sur sa face et ses tendres yeux. Sur les photos de son premier anniversaire, il a l'air inquiet et perdu. Parfois, des mots s'échappaient, à voix bien trop haute, parfois trop bas, habituellement d'une manière plate et sans expression, toujours en s'arrêtant et hésitant. Adam a l'air de quelqu'un ne parlant pas l'anglais [sa langue maternelle; ndt] et qui est occupé à tenter de faire une traduction mot à mot dans sa tête. J'ai dit à sa maman : "Quand Dieu l'a créé, Il a dû y placer le module de japonais par erreur."

C'est ainsi qu'il y a un cercle de silence autour du bel Adam. Il ne communique pas beaucoup. Si vous lui posez une question, il va probablement la répéter, ou simplement l'ignorer. Il n'est pas intéressé par les autres enfants, et n'a pas d'amis en dehors de la famille. Il est distant, une station spatiale surchargée de données, orbitant en silence, au loin.

Le silence, c'est ça qui blesse. Les parents ne font pas qu'aimer leurs enfants, ils aspirent aussi à connaître leurs enfants. J'ai entendu des mamans en chambre d'accouchement dire à leur nouveau-né "ouvre tes yeux que je puisse te voir!" - car elles pouvaient voir tout de leur bébé sauf ses yeux. Un bébé est un présent que vous ne savez pas déballer en une fois. Cela dure des années avant de savoir lire ses yeux, apprendre ce qui le fait rire, le regardant batifoler avec des amis, écoutant ses prières faites dans le creux de son lit. Mais avec un enfant autiste, la plupart de ces choses peuvent être impossibles.

Quand vous y pensez, le langage est quelque chose de plutôt complexe. C'est ce qui nous permet de communiquer, mais aussi ce qui rend la communication frustrante. Celui qui s'exprime doit plonger dans son grenier à mots, où tout est rangé en désordre, et en retirer ceux qui conviennent, plus ou moins; ensuite il les fait descendre et projette l'assemblage verbal dans l'air vide entre lui et l'auditeur. L'auditeur reçoit séquentiellement les mots, comme des galets tombant au sol. Il doit les rassembler et les rapporter dans son propre grenier-dictionnaire; là ils vont se bousculer avec des significations et des associations auxquelles l'orateur ne s'attend pas.

Quelle pagaille incroyable que tout cela, et si complexe que s'en est surprenant que qui que ce soit parvienne à s'en sortir. Vous pouvez dès lors comprendre pourquoi un autiste, trouvant ceci encore bien plus difficile que nous, peut opter pour simplement se retirer de la conversation.

Adam annonce "je vais décoller de ce monde." Il veut devenir astronaute et aller dans une navette spatiale. Ca c'est son dernier centre d'intérêt. "Toi" – et à ce moment-là il enfonce son index dans votre bras – "toi tu resteras ici."

Adam prévoit de partir loin, très loin de cet endroit déroutant et difficile. Parfois, même des non-autistes peuvent trouver l'idée séduisante. Il y a tant de manières pour mal nous comprendre et nous blesser les uns les autres, et même quand tout va pour le mieux, un sentiment de séparation assombrit notre joie. Nous regardons les autres de l'extérieur, tentant de deviner ce qu'ils pensent. Nous cherchons à établir le contact, et la peau même qui nous permet de toucher est cette barrière qui nous tient séparés. Le mieux que 2 personnes savent être, c'est 2 planètes sur une orbite commune, et c'est dans les moments les plus heureux que nous reconnaissons cette limitation. C'est peut-être pour ça que des gens pleurent lors de mariages.

Le problème qu'ont les autistes avec les autres gens est simplement une forme extrême de l'aliénation [isolement; ndt] qui nous perturbe tous. Les autistes souffrent beaucoup de la Condition Humaine.

Les parents d'autistes peuvent ressentir ceci : si même les meilleures relations humaines sont tristement limitées, quel espoir existe-t'il pour mon enfant? Une tragédie qui a eu lieu il y a quelques années m'a apporté une lumière inattendue sur une autre voie – la seule voie efficace – pour être profondément lié à ceux que nous aimons.

Lorsque mon père mourût dans un accident de voiture, j'avais 29 ans. Notre relation était encore très tendue, c'était ainsi depuis ma jeunesse – une forme de communication difficile différente de celle que connaissent les parents d'enfants autistes, mais cependant un triste exemple de la douleur que connaissent tous les humains qui tentent de s'aimer les uns les autres. Mais en écoutant les prières et les lectures de l'Écriture Sainte lors de ses funérailles, j'ai été frappée de découvrir que dans sa perspective, toute confusion avait disparu. Il se tenait dans la lumière de Dieu, où toutes choses sont rendues limpides et où toute vérité est connue. Cela signifiait, de sa perspective à lui, que notre relation était pour la première fois parfaite et entière, d'une manière qu'elle n'aurait jamais pu l'être sur terre.

Bien que ne me trouvant pas encore dans cette perspective, je peux cependant en saisir sa vérité. Le seul endroit où je pourrai revoir mon père est dans la présence de Dieu, Qui nous comprend tous les deux, et parfaitement – bien mieux que nous ne nous comprenons nous-mêmes. Et quand bien même Il voit très clairement en nous, Sa réponse est un amour infini.

Quand nous sommes déconcertés, esseulés ou blessés, quand la futilité des efforts pour établir une relation est bien trop douloureusement évidente, nous pouvons abandonner notre confusion au Seigneur. Il connaît chaque coeur de l'intérieur, "et tout subsiste en Lui" (Colossiens 1,17). Son amour est la vie qui ruisselle en toute la Création. Dès lors même en cette vie-ci, à travers Dieu, nous sommes reliés à ceux que nous aimons, quelque chose que nous arrivons à peine à saisir maintenant, mais qui un jour jaillira en notre conscience.

Les parents sont attristés par leur incapacité à communiquer avec un enfant autiste; il n'est qu'à un pas d'eux, à l'autre bout du fauteuil, mais pourrait tout aussi bien se trouver à circuler dans les noires étendues spatiales. Mais il est connu de Dieu. Il est transparent à la lumière de Dieu, qui irradie à travers chacun d'entre nous. Un Dieu Qui nous comprend, nous et nos enfants, et tous ceux que nous connaissons, et tous ceux que nous ne connaissons pas. Il n'y a qu'en Lui qu'un jour, nous pourrons nous aimer les uns les autres de la manière à laquelle nous aspirons de le faire, de la manière dont Lui le fait déjà. Saint Paul écrivait "alors, je connaîtrai comme je suis connu" (1 Corinthiens 13,12). Nous avons été parfaitement compris, même le moins compréhensible d'entre nous tous, et un jour, nous reposerons dans une communion pleine et entière et paisible.

Adam dit : "je vais quitter ce monde. Vous resterez ici. Mais je reviendrai près de vous. Je reviendrai bientôt."
Copyright © 1989-2006, Frederica Mathewes-Green.

http://www.frederica.com/email/


source des photos de peintures de M. C. Escher ci-dessus

Article cité par :
fatherstephen.wordpress.com/2007/05/10/frederica-mathewes-green-on-autism/

Biographie (extrait)
http://www.frederica.com/bio/
Frederica Mathewes-Green a écrit dans nombre de domaines d'intérêt; ces articles et travaux sont parus dans diverses publications telles que le Washington Post, Christianity Today, Smithsonian, the Los Angeles Times, First Things, Books & Culture, Sojourners, Touchstone, et le Wall Street Journal. Elle tient une chronique régulière dans le magazine internet Beliefnet.com, et elle rédige des revue de films pour le National Review Online. Dans le passé, ses commentaires ont été entendus dans une émission de la radio publique nationale, "All Things Considered and Morning Edition". Ses essais ont été sélectionnés pour le "Best Christian Writing" en 2000, 2002, 2004, et 2006. Elle a publié 8 livres et écrit quelque 600 articles.

Elle a aussi donné quelque 400 conférences en des lieux tels que Yale, Harvard, Princeton, Wellesley, Cornell, Calvin, Baylor, et Westmont, au Smithsonian Institute, Aspen Institute, Washington National Cathedral, Los Angeles Times Book Festival, American Academy of Religion, the Veritas Forum, the Family Research Council, et au National Right to Life Committee.

Elle a donné une entrevue sur PrimeTime Live, the Diane Rehm Show, the 700 Club, PBS, CNN, NBC, Fox News, et au Time, Newsweek, the New Republic, USA Today, the Chicago Tribune, the Philadelphia Inquirer, et New York Times.

Elle vit avec son mari, le prêtre Gregory Mathewes-Green, à Baltimore, Maryland (USA), où il est le pasteur et elle est la "khouria" ("mère") de la paroisse qu'ils ont fondée, Holy Cross Orthodox church. Leurs 3 enfants sont adultes et mariés, et ils ont 9 petits-enfants. Depuis 1997, Frederica a aussi enregistré des livres pour aveugles avec le programme radiophonique "Radio Reading Network of Maryland."

*-*-*-*-*-*-*-*

(voir en ligne l'impressionnante liste d'ouvrages & réalisations, en anglais)

L'archiprêtre John Dresko (OCA), dont certains de ses excellents articles ont déjà été traduits et publiés ici, recommande nottament aussi son introduction à la liturgie, pour la manière pratique et concrète avec laquelle elle a rédigé ce livre (page & livre en anglais)
http://www.dneoca.org/articles/eastandnow.html


04 juin 2007

Jeunesse & Orthodoxie: "Joie" n'est pas un gros mot


P. Aris Metrakos

Au cours des 3 semaines écoulées, j'ai travaillé sur 3 différents programmes de ministère auprès de la jeunesse, un pour le camp d'été de notre métropole, et les 2 autres pour des mini-retraites en Roumanie. En dehors du contexte ou de la langue utilisée, chacune de la bonne douzaine de parties que j'ai préparées a quelque chose de très important en commun avec les autres – elle ne commence pas avec quelqu'un qui parle à un groupe de jeune, mais avec des enfants participant à une activité où il s'agit de rompre la glace.

Les jeux du genre "brise-glace" sont parfois un peu fous, mais souvent des jeux où l'on se dépense beaucoup, et qui brisent les murs entre les gens. On demande à une centaine de participants de se regrouper avec tous ceux qui ont le même mois de naissance qu'eux. Des équipes s'affrontent pour trouver sur chacun de son groupe des objets qui représentent toutes les lettres de l'alphabet. Un cercle de 20 personnes essaie de compter jusqu'à 100, en substituant le mot "buzz" pour tous les nombres qui sont multiples de 5, et "fizz" pour ceux qu'on sait diviser par 7. Devinez ce qui arrive à 35?!

Toutes ces activités font quelque chose de bien plus essentiel que simplement échauffer un groupe. Elles nous font rire, bien souvent de nous-mêmes. L'amusement est une partie essentielle de l'éducation religieuse. Nous pouvons expliquer cela en termes psychologiques, anthropologiques et bibliques.

Nous apprenons tant de manière cognitive qu'affective, cela se passe à la fois avec notre cerveau logique, côté gauche, et notre cerveau émotif, côté droit. La mémorisation des tables de multiplication est plutôt une tâche pour la partie gauche du cerveau, alors que cesser de se ronger les ongles est plutôt une question affective. Les jeux actionnent notre partie affective, de sorte que nous puissions entrer dans une activité en étant plus qu'une demi-personne. Les cours et conférences font plus appel à la partie gauche qu'à la partie droite de notre cerveau, ce qui explique probablement pourquoi tant de personnes sortent de conférences sans avoir changé. La Foi se développe tant à travers notre raison que notre coeur. Les jeux de brise-glace ne font pas qu'échauffer un groupe, ils échauffent nos coeurs.

L'anthropologie Chrétienne Orthodoxe affirme cette réalité. Nous définissons la prière comme étant la descente de notre esprit dans notre coeur, de sorte que nous puissions rencontrer Dieu. Nous soumettons notre esprit à notre coeur, mais nous n'en jetons pas pour autant notre raison par la fenêtre. En fait, la véritable spiritualité dépend de notre raison (esprit) et de notre coeur. L'Orthodoxie rejette la "foi" basée sur les sentiments, qui est si en vogue chez nombre de Chrétiens contemporains (avez-vous vérifié votre baromètre spirituel aujourd'hui?), et l'hyper rationalisme des prétentieux prêcheurs du "mythe Jésus." Il n'y a rien de tel qu'un bon jeu de Buzz-Fizz qui a déraillé pour échauffer les 2 parties de notre cerveau, tout en soumettant simultanément notre esprit à notre coeur.

Jésus explique simplement et succinctement la nécessité d'être plus qu'un froid rationaliste : "Oui, vous dis-Je, celui qui ne recevra pas le Royaume de Dieu comme le fait un petit enfant, n'y entrera point" (Marc 10,15). Les enfants savent comment jouer et avoir une joie innocente, un comportement à 180° à l'opposé de celui du pompeux stoïcisme des Pharisiens.

Une des erreurs que j'ai commises quand j'étais jeune prêtre, c'était de ne pas accorder suffisamment de temps à la frivolité en préparant des programmes d'activités. Ces événements ratés qui mettaient l'accent sur l'apprentissage intellectuel tout en ignorant les jeux où l'on fait connaissance et les moments où l'on chante tous ensemble, fournissent tous de cruelles leçons aux inexpérimentés responsables de retraites. De nos jours, je ne planifierais plus jamais la moindre activité pour jeunes sans qu'elle ne comporte plusieurs éléments "marrants."

Les activités pour adultes ont aussi besoin de moments de détente. Je ne peux imaginer organiser une retraite pour adultes qui ne prévoirait pas de temps consacré à l'un ou l'autre jeu cocasse. Ceci m'amène au point principal où je voulais en venir.

Nous les Orthodoxes, nous sommes bien trop sérieux. Nous comptons nos "Kyrie eleison" comme une compteuse de billets de banque égrène ses billets. Nous nous exprimons dans les assemblées paroissiales en fronçant les sourcils et d'une voix véhémente. Nous ne nous saluons pas mutuellement d'une sainte accolade, mais en grimaçant.

Ce n'est pas surprenant que tant de paroisses soient spirituellement atrophiées – nous n'avons rien d'autre que des chiffres dans nos coeurs. Dans tous nos plans stratégiques et nos réunions de comités, nous avons oublié cette vérité qui est la plus importante : "celui qui ne recevra pas le Royaume de Dieu comme le fait un petit enfant, n'y entrera point."

Conseils de paroisse – arrêtez-vous plus tôt, et sortez pour aller dîner ensemble. Enseignants de l'école du dimanche, catéchistes – laissez de côté la Théologie Mystique de l'Église d'Orient, et achetez quelques livres de jeux coopératifs. Choeurs et chantres – rappelez-vous le Psaume 66,2, quand on enlève la joie, il ne reste que du bruit...

Je sais que la vie peut être pesante, nous remplissant de soucis et de douleur. Mais je ne peux croire que nous vivions dans des temps plus difficiles que ceux qui ont enduré la peste et l'invasion brutale d'armées ennemies. Et oui, nous avons besoin de clergé, de responsables laïcs, et de fidèles qui sont sérieux et zélés. Mais nous avons aussi besoin de nous rappeler les leçons durement apprises par les professionnels du ministère auprès des jeunes.

"Joie" n'est pas un gros mot!


Le prêtre Aris P. Metrakos est un prêtre Grec-Orthodoxe, pasteur de l'église Holy Trinity Greek Orthodox Church, à Columbia, Caroline du Sud. Ancien pilote de l'aéronavale dans la US Navy, il a passé 7 années en service actif avant de rentrer au Séminaire.

Régulièrement, il anime des retraites et donne des conférences tant pour jeunes que pour adultes. Il va chaque année en Roumanie pour y aider l'Église Orthodoxe à fonder une pastorale de la jeunesse roumaine. Vous pouvez le contacter (en anglais) via :
FrMetrakos@orthodoxytoday.org
Article original posté le 24 Mai 2007

03 juin 2007

Office Orthodoxe occidental à la Sainte Trinité (10ème siècle)

L'Office est disponible sur ce site :
http://home.scarlet.be/orthodoxia/
(lien direct du PDF)

J'en ai parlé (ici et ailleurs) dans le cadre du pèlerinage à saint Lambert de Liège. Nous avons eu en Belgique un grand liturge, doublé d'un saint, et Orthodoxe avant tout. En ce jour, normalement, dans mon pays, quand tout était encore Orthodoxe, c'est son Office à lui qui prévalait. A Constantinople, à la même époque, ils célébraient la Toussaint, et nous la Sainte Trinité. Et cela en parfaite communion de Foi. Comme c'est le cas aujourd'hui pour les paroisses de Rite Occidental dépendant de l'Église Orthodoxe Russe Hors Frontières (en communion avec Moscou & le restant) et les paroisses du Vicariat de Rite Occidental de l'archidiocèse Grec-Orthodoxe Antiochien en Amérique. Communion parfaite de Foi, diversité légitime de rites, coutumes, langues, etc.
Je ne m'étendrai plus sur ce problème du rejet de nos racines, d'autant plus grave quand il a lieu par ceux qui sont nés ici et qui ont des responsabilités dans l'Église. Ca m'afflige à chaque fois et j'en perds la charité, face à tant d'entêtement et de rejet du don de Dieu dont ils NOUS privent du coup... Etc!

Venons-en donc au contexte de cet Office Orthodoxe occidental à la Sainte Trinité. En quoi est-il légitime de le reprendre, est-il vraiment Orthodoxe, etc.

Tout d'abord, pour juger de son Orthodoxie, il faut juger sur pièce. Le texte. Ci-dessus, vous avez le lien, il suffit de cliquer et vous aurez l'Office. Si on veut une raison objective de le repousser, il faut (me) montrer dans le texte où "ça cloche." Critique interne, comme on dit.

Ensuite, l'auteur, première partie de la critique externe. Il est dans le calendrier de l'Église Orthodoxe. Ca devrait suffire, non?

Seconde partie de la critique externe, la période et le lieu. Les problèmes ont déjà commencé en Occident. Est-ce que Liège est déjà concernée ou pas? Voyons ça. Dans une traduction ici récemment proposée, l'historien d'Église Vladimir Moss expliquait fort bien que sans être une preuve formelle d'orthodoxie, le fait que quelqu'un ou quelqu'ouvrage de l'époque Orthodoxe de l'Occident ait été repoussé, rejeté voire anathémisé par la papauté romaine qui venait de chuter dans l'hérésie, c'était un très sérieux indice d'Orthodoxie en faveur du "rejet."
Au sujet de cet Office à la Sainte Trinité composé par saint Étienne de Liège, saint évêque né au Ciel en 920, voici quelques indices :

Vers 1052, Anselme de Liège nous apprend que cet Office est chanté à son époque : Gestae pontif. Leoden., Monumenta Germaniae Historica, Scriptores, t. VII, p. 204; MARTÈNE et DURAND, Amplissima Collectio, tome IV, col. 840 et 857 (Paris, 1723-1748)

Plus intéressant et rentrant bel et bien dans cette catégorie donnée par Vladimir Moss, le fait que Rome ait rejeté l'Office de l'évêque de Liège : "Quidam autem officium de Sancta Trinitate in octava Pentecostes instituunt. Nam quidam Leodicensis Stephanus idem officium, sicut et historiam de Inventione sancti Stephani, composuisse asseritur; quae utraque ab apostolica sede respuuntur." (Migne, Patrologie Latine, tome CLI, col. 1019.)

Autre fait intéressant, la chronologie liturgique. La date de la Fête de la Sainte Trinité le dimanche après la Pentecôte est présente dans l'Occident Orthodoxe. Par contre, la Rome déchue y résistera. Quand sa nouvelle religion imposera à nos pays son calendrier, ça posera des problèmes. A Liège par exemple, conscients de l'héritage à préserver, ils accepteront la nouveauté vaticane, soumission politico-militaire oblige... mais ça sera célébré en messe privée, matutinale. Et la grand messe, conventuelle, c'était celle de la Sainte Trinité, celle de saint Étienne de Liège donc!

On présente souvent de manière schématique la Germanie ou les Francs, comme "tous dans le même sac hérétique et filioquiste", sans faire dans le détail. Pourtant le détail est important. Rupert, abbé de Deutz (1070 - vers 1129/1135), ancien moine de l’abbaye liégeoise de Saint-Laurent, dans son "De divinis officiis", lib. 9, chap. 1), dit: "Aussitôt après avoir célébré la solennité de l'avènement du Saint Esprit, nous chantons la gloire de la Sainte Trinité, dans l'Office du dimanche qui suit, et cette disposition est très à propos, car aussitôt après la descente de ce divin Esprit commencèrent la prédication et la croyance dans le Baptême, la Foi et la confession du Père, du Fils et du Saint Esprit."
Ils n'ont donc pas suivit l'injonction romaine, et donc le texte liturgique l'accompagnant. Ils ont nécessairement l'ancien. Jugeons sur pièces.

Abbé de l'abbaye Saint-Jacques à Wurzbürg, en Bavière, mort en 1516, Jean Tritheim (Trithème), dans sa "Chronique d’Hirsauge", mentionne que l'Église de France le célébrait à son époque, le dimanche après la Pentecôte : "Hic (Stephanus) etiam ex libro Albini abbatis Turonensis Cantum ordinavit de Sancta Trinitate, quo in octavis Pentecostes Gallica jam utitur Ecclesia." (Chronicon monasterii Hirsaugiensis. Saint-Gall, 1690, page 51). Le texte mentionne clairement que l'usage était d'ailleurs répandu un siècle avant la composition de l'Office qui nous intéresse, puisque cet "Albini abbatis Turonensis" n'est autre que le célébrissime Alcuin, qui, nous l'avons vu dans un autre article sur ce blogue, s'opposa au "filioque" dans une controverse avec les chanoines de Lyon. Alcuin a par ailleurs composé un Office votif à la Sainte Trinité. Mais ce n'était pas de la même ampleur ni pour le même but que l'oeuvre de saint Étienne, comme on le voit à la diffusion de celui-ci à travers les siècles et même hors de l'Église Orthodoxe. Sa Messe votive, présente dans le Missel portant son nom, par l'emplacement dans le cycle liturgique qu'elle avait, motivera cependant Liège à introduire là cet Office. Mais Rome s'opposera à l'extension hors de Liège: en 1048 Bernon mentionne les rudes discussions (Baillet, vie des saints, Paris, 1716, page 151). En 1048, ça fait déjà 3 décennies que Rome n'est plus Orthodoxe.... pas encore en Schisme, mais déjà officiellement hérétique... Revenons aux témoignages d'usage de l'Office par delà le Schisme.

En plus de la France, Trithème dit avoir constaté le même usage liturgique dans certaines églises de Germanie: "Scripsit (Stephanus) etiam cantum de Sancta Trinitate ex Alcuino quo in octavis Pentecostes utimur" (Catalogus scriptorum ecclesiasticorum. Cologne, 1531, folio 60 v°). Ici il mentionne clairement Alcuin sous son nom connu, et pas sous le nom "poétique" qu'il utilisait pour ses échanges épistolaires avec les autres lettrés de l'époque ainsi qu'avec Charlemagne. Toute la Germanie n'avait donc pas encore totalement succombé.


En Belgique, le déplacement d'une semaine de la fête, à cause de la nuisible influence vaticane aura cependant lieu avant la France. J'ai été surpris de le découvrir en lisant de tout sur le sujet. Les "Statuts Synodaux" du 16 février 1288, par Jean de Flandre, prince-"évêque" de Liège, "corpus juris" de ce sous-groupe désormais vaticanisé, reprenaient en effet ceci : "De même, nous statuons que la fête de la Sainte Trinité soit célébrée le premier dimanche après l'octave de la Pentecôte, lequel est appelé octave de la Trinité, avec 9 leçons et la solennité due. Dans la semaine précédente, à savoir à partir des secondes vêpres de l'octave de la Pentecôte jusqu'au dimanche concerné, on chantera et l'on récitera, comme on a coutume de le faire, l'Office de la Sainte Trinité" (Schoolmeesters, Les statuts synodaux de Jean de Flandre, Liège, Cormaux, 1908; etc). C'est d'autant plus surprenant comme décision que les documents liturgiques postérieurs, tels l'Antiphonaire de Sainte-Croix; l'Ordinaire de Liège, 15ème siècle, Bruxelles, bibliothèque royale n° 11971-11972 folio 55 v°; l'Ordinaire de Liège, Cologne, 1492, folio O.I. r°; le Missel Liégeois, Anvers, 1552, folio CXII v°; et le Bréviaire Liégeois, Paris, 1535, comportaient encore la Fête à date et Office d'origine. Ce qui me semble aussi bien montrer l'existence d'une réelle et abyssale différence existant entre d'une part les potentats appelés princes-"évêques" dans ce système, inféodés au potentat romain et à sa nouvelle religion, et d'autre part les restants de Foi pratiquée par les gens d'ici. Ca perdurera encore quelques siècles, jusqu'à ce qu'au 18ème, Liège adopte la liturgie officielle du vatican...

In fine, pour montrer l'opposition à un Office Orthodoxe Occidental et son intérêt pour nous, il y a ceci : quelques siècles après la conclusion du Schisme et la naissance d'une nouvelle sorte de religion christique en Occident, son chef, Sixte IV (1471-1484), Franciscain, continua l'oeuvre de furieuse démolition de la Foi entamée par ses prédécesseurs et dans le domaine liturgique surtout à partir de 1256 – quand le premier chef vaticaniste d'origine franciscaine détruira littéralement l'Office des Heures hérité de l'Orthodoxie occidentale romaine et imposera leur composition à eux (*). Sixte IV donna l'approbation officielle pour l'office composé par un de ses comparses (un prédécesseurs dans son groupe, Jean Pechham), composition qui du coup se retrouva dans tous les livres vaticanistes en lieu et place de l'oeuvre orthodoxe. Vu l'implication dogmatique, on comprendra l'importance du fait, tout sauf anodin. J'ai lu l'affirmation Pie V aurait fait reprendre l'ancien Office, celui de saint Étienne. Certes. Mais sous quelle forme doctrinale, après plusieurs siècles d'interdit, de livres anathémisés, etc?? J'admet bien évidement que tout ceci n'appartient pas à l'histoire de l'Église du Christ. Mais cela permet de mettre en lumière l'importance de l'oeuvre. Même chez les hétérodoxes, on s'en est rendu compte. C'est pas peu dire!
sources des références :
en français : A. Auda: Étienne de Liège. L'École musicale liégeoise au Xe siècle, Bruxelles 1923 (dont proviennent par ailleurs les copies de la partition de l'Office, en notation carrée et non plus en neumes originaux)


(*) je n'invente rien ni n'exagère ni ne pratique une bête attaque en règle, ce sont les tristes faits et ils expliquent bien des choses. Cfr sur le sujet le très éclairant ouvrage de Dom Pierre Salmon, "L'Office divin au Moyen Age", histoire de la formation du Bréviaire du 9ème au 16ème siècle, éditions du Cerf, collection Lex Orandi n°43, Paris, 1967. Sidérant.


Représentation très symbolique de la Trinité: tout est feu.
ROTHSCHILD CANTICLES
Source : Yale's Beinecke Library

A défaut d'avoir (pour le moment) la chance de le recélébrer dans l'Église, on peut l'écouter en se rabattant sur un groupe de chant médiéval qui l'interprète (ce sont des extraits de l'Office mèlé à d'autres pièces postérieures) :



Vous trouverez ici une note technique intéressante pour les musicologues et liturges, elle parle de l'Office de saint Lambert par saint Étienne mais éclairera assurément d'autres aspects de cet Office-ci:
http://aedilis.irht.cnrs.fr/jeudis9899/jeudis_mep_07.htm

Hagiographie & liturgie : parfois, un texte est réécrit pour permettre son vécu liturgique. Quand c'est l'oeuvre d'un saint liturge Orthodoxe, le résultat est à l'avenant. Comme pour la vie de saint Lambert :
http://www.cths.fr/4DACTION/www_Con_Communic/2775

Pour conclure cette présentation certes à forte teinte apologétique, petit retour sur saint Lambert. Voici une photo d'une page d'un manuscrit anoté, avec ses neumes.


C'est d'autant plus émouvant que la célèbre hymne & antienne "Magna Vox" s'y lit. Notre héritage. Qu'on n'a pas pu utiliser hier à Liège, sous prétexte que c'est du latin et "qu'on s'est assez battus pour avoir la liturgie en langue locale", argument acceptable en lui-même et qui m'avait convaincu d'y participer. Mais alors pourquoi on a dû entendre des prières en vieux russe ou vieux grec? C'est langue locale de Belgique, ça?...
Où c'est qu'il traîne encore ses savates, le notaire? Cet héritage, si les autres en veulent pas, nous oui!


P. Seraphim Holland: Dimanche de la Toussaint


"Quiconque se sera déclaré pour Moi devant les hommes, à mon tour Je Me déclarerai pour lui devant Mon Père qui est dans les Cieux."

Aujourd'hui, dimanche après la Pentecôte, nous commémorons tous les Saints, et nous sommes inspirés par ces 2 lectures, du moins je l'espère, parce qu'elles contiennent beaucoup d'encouragement. Comment ne pourrait-on se sentir encouragé quand tout ce choeur de justes est énuméré de la sorte par le saint Apôtre Paul, qui ensuite nous dit "Eh bien! donc, environnés que nous sommes d'une telle nuée de témoins, débarrassons-nous des entraves du péché, armons-nous de patience et courons au combat qui nous est proposé, le regard fixé sur Qui donne à notre Foi son début et son achèvement, Jésus. À la place de la joie qui Lui était offerte, bravant la honte, Il supporta la Croix, et Il siège désormais à la droite du Trône de Dieu" (Héb. 12,1-2).

Cela devrait être comme un refrain pour nous Chrétiens. Et les saints sont tous décris à la fin de l'Évangile du jour. Chaque juste ayant vécu depuis les débuts de l'humanité, qui a plu à Dieu, qui a lutté contre ses péchés, qui a cru vraiment dans la Résurrection, aujourd'hui il est concerné, parce que notre Seigneur a dit : "quiconque aura laissé pour Moi, maisons, frères, soeurs, père, mère, enfants, ou terres, recevra le centuple et possédera la vie éternelle." Cela décrit à merveille le genre de vie qui est agréable aux yeux de Dieu, la vie à laquelle nous sommes appelés. Nous sommes appelés à ne pas nous attacher à tout ce qui nous alourdit, le péché qui nous assailli si facilement, et même notre père ou mère ou frère ou soeur, s'il nous retient, s'il veut nous empêcher d'atteindre le Royaume de Dieu. Dans la plupart des cas, ça ne sera pas nécessaire.

Jésus-Christ ne nous dit pas de toujours abandonner notre père et mère, etc. En effet, nous devons les aimer, et les honorer, qu'eux honorent Dieu ou pas. Mais ici nous avons une mesure de jugement; nous recevons un ordre de priorité. Si nous voulons hériter de ce qui est notre droit de naissance, alors nous devons vivre conformément à ce que ce droit de naissance implique. Vous vous souvenez sûrement d'Esaü et de Jacob; Esaü avait, de naissance, le droit d'aînesse. Mais il ne vivait pas en conformité avec ce droit, et dès lors il lui fut enlevé. Ces lectures ne contiennent pas seulement l'encouragement et cette incroyable joie que nous devrions ressentir à propos de la grâce de Dieu. Elles contiennent aussi un projet concret, un chemin nous montrant comment vivre. Non pas seulement comment vivre, mais aussi comment ne pas vivre. La promesse est là, qui contient aussi, très très clairement exprimée pour ceux qui ont des oreilles pour entendre et des yeux pour voir, tout ce qui advient quand on ne suit pas le Christ.

Aujourd'hui c'est donc le dimanche après la Pentecôte. Cette Pentecôte, Descente du Saint Esprit, le don du Saint Esprit sur tous ceux qui sont dans l'Église, c'est ce qui nous rend capables de faire partie de ce choeur des saints. C'est ce qui aide tout le monde à parvenir à la connaissance de Dieu et à la droiture. Saint Paul dit que par la foi ils firent ceci, et par la foi ils firent cela. Ca, c'était aux temps de l'Ancien Testament, avant le don du Saint Esprit. Ils sont d'autant plus remarquables, les exploits de ces saints d'avant la venue du Christ, car le Saint Esprit ne demeurait pas en eux. Le Saint Esprit influençait leurs vies, les guidait, les aidait, mais ne demeurait pas en eux. Ca, c'était prévu pour un autre temps. Et saint Paul y fait allusion quand il dit "Et tous ces martyrs de la foi n'ont cependant pas connu la réalisation des promesses, parce que Dieu, qui avait en vue un sort meilleur pour nous, ne voulait pas qu'ils arrivent sans nous à la perfection" (Héb. 11,39-40). Il pointe vers la venue du Dieu-homme, Jésus-Christ, et ensuite le don du Saint Esprit après ce que Jésus-Christ a montré et accompli qui était nécessaire pour notre Salut. Il nous a montré comment vivre, et a vécu selon Ses Commandements, et Il S'est relevé d'entre les morts. Et ensuite la venue du Saint Esprit nous illumine, nous renforce, et nous permet d'accomplir la volonté de Dieu, et d'obtenir le fruit de la promesse.

Je voudrais examiner certains détails dans l'Évangile – en passant, cet Évangile est une lecture composée. Il est formé d'une partie du chapitre 10 et d'une partie du chapitre 19 de l'Évangile selon saint Matthieu. Dans le contexte, cela se glisse particulièrement bien, et c'est pourquoi le Saint Esprit a dû vouloir que ces péricopes soient lues ensemble comme c'est le cas aujourd'hui. Notre Seigneur y dit "Quiconque se sera déclaré pour Moi devant les hommes, à mon tour Je Me déclarerai pour lui devant Mon Père qui est dans les Cieux." Et comment Le confessons-nous? Non pas en paroles mais par nos actions; dans nos priorités et dans notre manière de nous occuper d'autrui; dans ce que nous disons être important et ce que nous montrons être important.

Certaines évidences pourraient vous venir à l'esprit. Nous confessons le Seigneur en montrant que nous veillons sur le Christianisme, que nous menons nos vies d'une manière morale. Le monde entier s'est tourné vers Sodome et Gomorrhe, mais nous ne pouvons pas l'y suivre. Nous devons avoir le courage de nous y opposer, de nous opposer à toute forme d'immoralité et de vice. C'est ça, confesser le Christ. A présent, il y a une nouvelle forme de Christianisme, qui n'en porte que le nom. Ca fait déjà pas mal d'années que ça existe. A vrai dire, vous pouvez en voir les débuts déjà dès les temps apostoliques. Mais assurément, au cours des quelques siècles écoulés depuis l'époque des Lumières, certains ont décidé que ce serait une forme acceptable de vie.

Cette manière de vivre confesse le Christ de ses lèvres, mais pas en action, pas dans la morale, pas dans la manière dont nous vivons, pas dans la manière dont nous ordonnons nos vies. Ce nouveau Christianisme, contre lequel l'Orthodoxie n'est pas immunisée, contient une sorte de dichotomie entre le croire et l'agir. Mais en réalité, cela n'existe pas. Là se trouve le grand mensonge. La Foi sans les oeuvres sont mortes (cfr Jacques 2,26). Il n'existe pas de dichotomie entre agir et croire. Et si vous ne vivez pas selon ce que vous dites croire, alors vous ne confessez pas le Christ. Et nous avons reçu tout ce qu'il faut pour parvenir à Le confesser. Nous avons reçu le Saint Esprit, le Consolateur, Qui vit en nous si nous Lui faisons une place, si nous purifions effectivement notre âme, et si nous l'embellissons et la nettoyons par notre effort et notre désir. Et Il nous aidera en tout. Mais si nous ne vivons pas dans la justice, alors nous ne confessons en réalité pas le Christ.

Le Christ dit qu'Il Se déclarera pour nous devant Son Père, si nous vivons conformément à Sa volonté, et Le confessons en notre vie présente. Mais Il ne nous reconnaîtra pas devant Son Père si nous ne vivons pas de la sorte. Pour ceux qui ne vivrons pas de la sorte, Il a gardé les paroles suivantes : "Je ne vous connais pas. Je ne sais pas qui vous êtes. Vous n'avez pas de part avec Moi. Vous n'êtes pas devenu comme Moi. Allez-vous en, allez dans les ténèbres" (cfr Mt 7,23). Ces paroles sont réservées pour ceux qui confessent de leurs lèvres, mais pas dans leur manière de vivre, pas dans leurs priorités.

Maintenant, il y a aussi d'autres aspects pratiques. Dans notre société moderne, nous sommes constamment dans des situations de vie sociale. Avez-vous peur de faire le Signe de Croix avant de manger au restaurant? Si c'est le cas, vous devriez pleurer et vous lamenter et vous frapper la poitrine et en demander pardon à Dieu, et ne pas recommencer. Avez-vous peur, quand vous êtes avec des amis, ou dans votre milieu professionnel, ou avec quiconque vous rencontrez durant votre parcours de vie quotidienne, de montrer vos priorités et votre manière Chrétienne de penser? Ou changez-vous les priorités en fonction des vicissitudes de votre vie, de sorte que vous n'ayez peut-être pas de problèmes, ou que personne ne pense du mal de vous, ou simplement pour ne plus subir d'inconvénient? Désolé, ça non plus ce n'est pas confesser le Christ.

Ca, c'est confesser le démon, parce que c'est la manière dont le démon veut que nous vivions. Le démon est très heureux de ce prétendu Christianisme. Il adore ça. En fait, je pense qu'il le préfère de loin au paganisme, parce que souvenez-vous ce que dit notre Seigneur à l'église de Laodicée, dans l'Apocalypse selon saint Jean : "Ainsi, puisque te voilà tiède, ni chaud ni froid, Je vais te vomir de Ma bouche" (Apoc. 3,16). Non, frères et soeurs, nous ne sommes pas tièdes. Nous avons le feu en nous. Le Saint Esprit nous réchauffe. Ce feu brûlerait tout, mais ne nous brûle pas; il devrait brûler les péchés en nous, et il devrait irradier. Il devrait y avoir de la lumière. Les gens devraient le voir.

Je suis convaincu que ceci sont les 2 raisons principales pour lesquelles nos églises ne sont pas remplies – d'abord c'est que le monde est devenu vraiment très très mauvais, et les gens ne sont pas intéressés par la manière Chrétienne de vivre. Ils sont intéressés par un Christianisme de nom, mais pas d'ordonner complètement leurs vies selon le Christ. Ca c'est la première raison. Mais il y a la seconde, c'est que nous ne rayonnons pas. Nous ne professons pas le Christ dans tous les aspects de notre manière de vivre, comment nous pensons, comment nous établissons nos priorités. Dans notre milieu professionnel, tout un chacun devrait pouvoir remarquer quelque chose, ou penser que nous sommes différents. Certains pourraient nous haïr de ce fait – réellement et concrètement. Certains ont haï le Christ. Mais aucun de ceux qui ont croisé le Christ n'a manqué de remarquer quelque chose Le concernant, quelque chose qui devait amener à prendre une décision à cause de Lui. Il devrait en être de même avec nous.

Nous devons confesser le Christ devant les hommes. Ne menez pas votre vie selon les priorités de ce monde. Ne laissez pas quoi que ce soit bloquer par tous les moyens votre lutte contre vos passions, et par tous les moyens le désir de suivre les Commandements. Nous avons cette nuée de témoins. Regardez ce qu'ils ont fait : par la Foi, ils ont vaincu des royaumes, ils ont accompli la justice, ils ont obtenu les promesses, ils ont affronté la gueule des lions, ils ont été sciés et déchiquetés, ils ont erré vêtus de peaux de moutons et de chèvre. Le monde n'était même pas digne d'eux. Tout cela, c'était des luttes. Rien de ce que je viens de mentionner n'est agréable. Tout cela, ce sont des épreuves difficiles. La vie Chrétienne est en effet une épreuve, une difficulté, une arène : c'est une lutte cruciale.

Si ceci fait trembler votre coeur, alors vous devez supplier le Saint Esprit d'être encore plus présent en vous, et être joyeux en ce jour où tant sont entrés dans le Royaume des Cieux, et nombreux parmi eux ont enduré les combats, et la douleur, et la peine, et ont supporté jusqu'au bout, et sont parvenus au Royaume des Cieux. Et ils sont tous un exemple pour nous, pour tous et partout. Et ils sont la preuve que la résurrection est vraie. La résurrection est véritable. Et cela change un homme. Cette nouvelle est la meilleure nouvelle que l'on puisse donner. Il n'y a rien de plus grand. La résurrection nous change! A présent, notre vie est remplie d'amertume et de difficultés. Certaines difficultés nous sont imposées du dehors, causées par des gens que nous connaissons, ou que nous ne connaissons pas. D'autres viennent de l'intérieur, de notre propre état de pécheur, de notre manque de foi, de notre manque de constance, de notre manque de bonnes priorités. Mais peu importe, la vie est une lutte. Tout le monde comprend cela. Mais Dieu nous a donné les outils pour tenir bon dans ce combat.

Dieu nous a donné tout ce dont nous avons besoin, et en ce jour, nous célébrons toute l'assemblée des Saints qui ont tout supporté jusqu'au bout, comme un exemple pour nous, mais aussi – et nous devons le comprendre, et nous devons être capables d'avoir ces 2 pensées présentes en même temps – aussi comme un reproche contre nous. Ils sont à la fois un reproche et un encouragement pour nous, les deux à la fois et en même temps. Parce qu'ils ont tout supporté. Ils étaient fait de la même chair que nous. Ils ont eu les mêmes difficultés que nous face aux péchés. Ils ont reçu la même grâce que nous, la même vérité, le même Dieu, le même Saint Esprit. Mais ils ont mené le bon combat, et ils ont tenu bon; ils sont parvenus à la fin du parcours.

Et à présent, nous sollicitons leurs intercessions devant Dieu, nous pécheurs. Nous pouvons y parvenir; nous devons parvenir à atteindre une partie de ce qu'ils ont atteint. Nous sommes appelés à la perfection (cfr Lévitique 11,45). Le Christianisme, c'est pas simplement un système de croyance, ou d'appartenance. C'est le changement continuel et extrême de l'homme. Et c'est une bonne nouvelle. Il y a tant de choses qui ne tournent pas rond en nous, tant de choses incomplètes, tant de choses qui blessent, tant d'imperfection, tant de choses que nous ne connaissons pas, tant de choses qui nous affligent; Dieu changera tout cela. Plus de tristesse, plus d'inachevé, plus de maladie, plus de mauvaises pensées, plus rien de quoi que ce soit qui nous fait avoir grise mine, mais au contraire, tout sera lumière.

C'est ça que Dieu veut nous donner. Nous devons vivre notre vie conformément à cette promesse, nous devons viser cette promesse, et lutter pour cette promesse. Alors nous serons vraiment appelés ami par notre Seigneur (cfr Jn 15,15). Il nous appellera ami, et nous serons à même de crier "Abba, Père." Quelle incroyable intimité avec Dieu! Les saints l'ont obtenue. Et nous pouvons y parvenir. Mais uniquement de haute lutte, uniquement en confessant le Christ, uniquement en vivant conformément à Ses Commandements. Au milieu de la lecture de ce jour, on lit : "Celui qui ne prend pas sa croix et ne Me suit pas, n'est pas digne de Moi." Nous devons lutter, exactement comme Il nous a dit qu'il faudrait le faire. Je suis sans cesse bouleversé par les vies des saints, et par les écrits des Pères, par comment ces gens-là pensaient que notre état de dépravation et la grande miséricorde de Dieu étaient si soudés. En presque chaque page de l'Écriture on trouve présente cette connaissance de la condition de l'homme, qui est déplorable, et la promesse de ce que l'homme deviendra. Et nous le voyons dans les saints. Nous voyons leur droiture, comment Dieu les a amenés à la Patrie. Nous voyons aussi leurs luttes, et nous devrions les comparer aux nôtres, et toujours mettre en parallèle la connaissance de ce que Dieu nous a préparé avec la connaissance de quelle sorte de personne nous sommes réellement. Il faut toujours entremêler les 2. Et alors nous lutterons. Nous persévérerons, et nous lutterons, et nous parviendrons à la fin du parcours. Le Saint Esprit a rendu cela possible pour nous. Le Saint Esprit nous éclaire, et vit en nous si nous vivons selon Ses Commandements. Puisse Dieu vous aider à confesser le Christ en tout ce que vous dites et tout ce que vous faites, dans la manière dont vous établissez vos priorités et dont vous menez vos vies. Amen.

Prêtre Seraphim Holland
St Nicholas Orthodox Church, Dallas, Texas, USA
(Église Orthodoxe Russe Hors Frontières)
serap...@orthodox.net Ph:972/529-2754 MOBILE & VOICE MAIL 214 336-3464
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WEBMASTER FOR: St Nicholas Home Page
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photos : monastère stavropégique Saint John the Baptist, Maldon, Essex, Angleterre. Chapelle de tous les Saints. 31 octobre 2003, retraite du centre de formation orthodoxe Saint-Jean. L'iconographe y travaillait encore; photo prise au petit matin, dans une très faible luminosité et sans trépied.