"Ô étrange Église Orthodoxe, si pauvre et si faible, qui se maintient comme par miracle à travers tant de vicissitudes et de luttes. Église de contrastes, à la fois si traditionnelle et si libre, si archaïque et si vivante, si ritualiste et si personnellement mystique.
Église où la perle de grand prix de l'Évangile est précieusement conservée, parfois sous une couche de poussière. Église qui souvent n'a pas su agir, mais qui sait chanter comme nulle autre la joie de Pâques."
P. Lev Gillet ("Un moine de l'Eglise d'Orient)

16 avril 2011

La prière - quelques conseils pour un fils spirituel (p. Paisie Olaru)

http://valahia.wordpress.com/2009/10/19/about-prayer/#more-281




Toute prière est un don de Dieu. Mais nous, les faibles, nous n'avons que la prière orale, celle que nous n'arrivons à dire qu'en l'exprimant à voix haute. Alors mon fils, pour le moment, tiens-en toi à cette prière. Car le puits est profond, mais la corde pour atteindre le fond est courte, et le seau pour puiser est petit.

Au matin, lit l'Acathiste à la très sainte Mère de Dieu, et au soir, lit sa Paraclesis. Le Credo est aussi essentiel, au moins une fois par jour; et lit le Psaume 50 deux ou trois fois par jour..

Ensuite, lit d'autres prières. Le canon est une question de volontarisme, dépendant complètement de la bonne volonté de chacun. Le Notre Père, très souvent, la Prière du Coeur, d'innombrables fois, aussi nombre de génuflexions. Chacun autant qu'il sait en faire; car jamais l'abeille seule n'arrivera à récolter tout le nectar d'une fleur. Cependant, il est bon pour tous de mettre un peu d'ordre dans sa vie. Je m'examine et ce que je fais habituellement : si je me lève au matin et j'accomplis un peu de ma règle de prière, c'est comme si j'étais quelqu'un de nouveau pour toute la journée. Mais si en te levant au matin, tu commence à courir dans tous les coins de ta maison, dans le souci – "je dois faire ceci, et cela" – alors la journée ne sera pas bonne. Alors un petit peu du canon de prière chaque jour, comme le juste Job, qui sacrifiait tous les jours pour ses fils – au cas où ils auraient commis quelque chose de mal en pensée (Jb 1,1-5).

Chaque jour, accomplit autant de génuflexions que tu le peux devant la sainte Mère de Dieu – au moins 12 – et à chacune, dis, simplement, comme nos vieilles paysannes ici : "très sainte Mère de Dieu, ne m'abandonne pas, ne m'abandonne pas Mère de Dieu." N'oublie jamais la Toute Pure, mon fils, ne l'oublie jamais, car elle est si bienveillante! Et n'abandonne jamais la prière, mon enfant.. Fais une génuflexion, lit un Psaume, dit la Prière de Jésus. Chacun doit accomplir un peu de la règle. Parce qu'un vêtement sale ne se lave pas uniquement à l'eau, il faut aussi du savon et quelque chose de plus puissant, pour arriver à le laver.

Et si tu prononces 100 fois "Seigneur Jésus," essaie au moins 10 fois que ton esprit soit avec. Lorsque tu parle avec quelqu'un, tu ne te tiens pas devant en lui tournant le dos, n'est-ce pas? Alors quand tu parles à Dieu.. Chère âme, c'est ce que le p. Daniel avait l'habitude de me dire : "Païsie, mon ami, ne laisse pas tes pensées s'égarer hors de ta cellule monastique."

Les pensées viendront et s'en iront, mais ne les entretient pas, n'y prête pas attention. Veille à ce que la prière occupe toujours ton esprit; dit sans cesse "Seigneur Jésus". Que cette prière devienne ton habitude de tous les instants, et pour chaque Acathiste ou Paraclesis que tu n'aurais pas pu achever, fais 24 génuflexions – fais au moins ça.. Ici à Sihla (et à Sihăstria), à minuit, nous avons une vigile. Essaie de te lever, fais 3 signes de Croix, dis "Roi Céleste," le "Notre Père," et ce que tu connais d'autre, fais 24 génuflexions – et alors ce sera comme si tu avais participé à toute la vigile..

Mon fils, quand les larmes ne te viennent pas pendant la prière, c'est aussi pour notre humilité, de sorte que nous ayons à devenir humble. Il n'est pas besoin de pleurer abondamment. "Le sacrifice que Dieu agrée, c'est un esprit contrit, et un coeur humble, Ô Dieu, Tu ne le repoussera pas."

Il faut le savoir parce que parfois le démon t'aidera à pleurer, de sorte que tu pourrais en tirer fierté, et perdre ton âme. Il y avait une femme qui venait souvent nous voir; et un jour elle me dit "père, parfois je fais 100 génuflexion par jour" – mais elle les accomplissait sans la moindre bénédiction. Et je lui répondit "à partir de maintenant, plus 100 mais seulement 24 par jour. A partir de maintenant, tu as la bénédiction mais pas pour plus que ça." Et le mois d'après, elle est revenue et m'a dit : "Père, je n'arrive pas à faire 24 génuflexions par jour. Je ne sais pas ce qui se passe. Moi qui arrivait à en faire très facilement 100 par jour, je n'arrive pas à faire les 24 quotidiennes que vous m'avez recommandées!" Tu vois? L'ennemi la combattait, parce que pour ces génuflexions-là, elle avait reçu la bénédiction. Alors que quand elle en faisait 100, il y avait aussi beaucoup d'orgueil en tout ça.

C'est pourquoi tout ce que tu fais, fais-le avec la bénédiction de ton père spirituel. A chaque fois que tu pars d'ici, va vers ton père spirituel et demande-lui une règle de prière. De la sorte, il connaîtra ta règle de prière, et toi, de l'autre côté, tu en fera autant que ce pour quoi tu as reçu la bénédiction. Il est bon aussi de demander conseil et bénédiction pour toute bonne action que tu aimerais entreprendre, ou pour un jour de jeûne, etc. Tout ce que tu fais, fais-le avec la bénédiction de ton père spirituel, mon fils, de sorte que l'ennemi ne se sente pas assez fort pour perturber tes efforts.



source
http://fiifericit.blogspot.com/2009/01/parintele-paisie-olaru-despre-rugaciune.html

15 avril 2011

L'amour-don et l'amour écrasant (p. Savatie Bastovoi)

http://valahia.wordpress.com/2011/01/12/everytime-we-love-we-retrain-the-other-one/



Ce dont je veux parler, c'est de l'amour suffoquant, où quelqu'un "prend possession" de son prochain, qui commence à "modeler" autrui selon sa vision des choses. Je pense que nous avons tous fait cela : par exemple, les parents qui aiment leurs enfants au point que les enfants, lorsqu'ils grandissent, ne savent comment échapper à la "tyrannie" de leurs parents – qui n'est pas vraiment une tyrannie mais qu'ils perçoivent comme telle. Dès lors, la première méprise, la première "erreur" d'amour, c'est d'agir comme ceux qui pensent réellement savoir ce qu'est l'amour, qui pensent dès lors qu'ils peuvent – ou même doivent – imposer cela à autrui.

L'Apôtre Paul nous dit que l'amour supporte tout, croit tout, pardonne tout. L'amour ne se félicite pas, ne cherche pas son intérêt, ne se vante pas; l'amour ne faillit jamais. Dès lors afin de ne pas nous égarer dans notre propre compréhension déformée de l'amour, l'Apôtre dresse une liste des signes de l'amour véritable: être près de l'autre comme si on n'était pas là. L'amour ne cherche pas son propre intérêt. A chaque fois que nous aimons (selon notre vision de l'amour), nous limitons l'espace de l'autre.
Cette sorte d'amour ne porte jamais de fruit. Mais l'humilité a toujours convaincu. Elle a même bien des fois réussi à convaincre jusqu'à des tyrans.

Hiéromoine Savatie Baştovoi

(Extrait d'une conférence du hiéromoine "sur les erreurs en amour", Arad, Roumanie 13 déc 2007)

14 avril 2011

Le coeur et l'esprit (p. Sofian Boghiu)

http://valahia.wordpress.com/2011/01/23/heart-and-mind/



Lorsque nous unissons ces 2 centres – le coeur et l'esprit – alors ils deviennent une unité spirituelle, et alors l'homme est entier, comme Dieu l'a créé : un homme en plénitude. Par la Prière du Coeur, on parvient à ce saint idéal de notre vie terrestre.

Cependant, avant que nous ne parvenions à ce but ultime d'anoblissement de l'âme, de sanctification intérieure, d'élévation de cet être déchiré par les passions qu'est notre humanité, nous avons besoin de travailler avec force et détermination pour éliminer nos passions – ce qui n'est pas facile du tout – afin de chasser au loin le mal de nos esprits et coeurs, et de réunifier notre esprit, qui ne cesse de se disperser durant la prière, comme je l'évoquais auparavant.

Si nous n'étions pas aidés du Ciel dans ces efforts, notre lutte contre nous-mêmes serait presque vaine. Cependant, pour notre réconfort et notre renforcement, nous pouvons chercher de l'aide dans l'expérience et les conseils des saints Père, que l'on retrouve dans les Vies des saints et dans toute la littérature patristique.

Archimandrite Sofian BOGHIU (7 Oct 1912 – 14 Sept 2002)



Pour compléter l'article du jour, notre lecteur Antoine signale cette belle prière préparatoire, citée par le p. Placide (Deseille) à la fin de son livre "la spiritualité orthodoxe et la philocalie":

J’ai quitté le Pharaon,
l’esclavage de l’Egypte,
à la suite de Moïse,
pour gravir le Sinaï

Pour gravir le Sinaï,
O combien je le désire,
Arriver au Saint Sommet,
En disant la prière.

L’ascension est très ardue ;
Seigneur, donne la patience,
Fermeté, force et puissance,
D’acquérir la prière.

Avant tout l’obéissance,
L’Ecriture, la cellule
Et le très sage silence
Affermissent la prière.

Pour pouvoir dire la prière
Il te faudra rejeter
Et chasser de ta pensée
Toute chose de ce monde.

Au début, fais la prière
Vocalement avec labeur
Et plus tard, avec le temps,
Elle descendra dans ton cœur.

Fixe bien ton attention
Sur les mots de la prière
Sinon tu t’égareras
Dans un monde imaginaire.

Le malin est irrité,
Agacé par la prière ;
Ne sois donc pas effrayé
Quand il te ferra la guerre.

Les paroles de la prière
Portent des fruits savoureux ;
Ils sont plus doux que le miel,
Tu ne peux l’imaginer.

Et ne me demande pas
Comment agit la prière
Je ne saurais l’expliquer
Car c’est un divin mystère.

Quand tu verras la prière
Agir au-dedans de toi,
Garde-la soigneusement,
Dans une grande humilité

Révérend Géronda,
Mon Moïse spirituel,
Donne ta bénédiction,
Que j’acquière la prière.

La Vierge Mère du Christ,
L’higoumène mystique,
Elle bénit tous les moines
Et leur donne la prière

Pour gravir le Sinaï,
O combien je le désire,
Arriver au Saint Sommet
En disant la prière.

En disant la prière
Seigneur Jésus-Christ
Fils et Verbe de Dieu
Aie pitié de nous, Amen.


13 avril 2011

Carême: faites payer les riches, taxez-les! (saint Jean Chrysostome, Alexandre Soljenitsine)


"Devrions-nous nous tourner vers les rois et les princes pour redresser les inégalités entre riches et pauvres? Devrions-nous envoyer la soldatesque s'emparer de l'or des riches et le redistribuer parmi les pauvres de leur entourage? Devrions-nous supplier l'empereur d'imposer des taxes si écrasantes aux riches qu'ils s'en retrouvent pauvres, puis partager l'argent de la taxe équitablement entre tous?
L'égalité imposée par la force ne mène à rien et cause bien des troubles. Ceux qui avaient à la fois un coeur de pierre et un esprit rusé trouveraient bien le moyen de vite redevenir riches. Pire encore, les riches à qui on aurait confisqué leur or en conçoivraient un grand ressentiment; et les pauvres qui recevraient l'or des mains des soldats n'en auraient aucune gratitude, car le don ne serait pas arrivé par générosité.
Loin d'apporter un bénéfice moral à la société, cela lui apporterait un tort moral. La justice au plan matériel ne saurait être obtenue par la force, car elle ne s'accompagne pas d'un changement de coeur. La seule manière de parvenir à la vraie justice, c'est de changer d'abord le coeur des gens - alors seulement, ils partageront avec joie leurs biens et richesses.
"
saint Jean Chrysostome



"On Living Simply" XLIII
(le compilateur ne cite hélas pas la référence en grec. Enfin, "si non e vero", car ça ressemble fort à l'auteur)

"Dans la vie de la société, la liberté et l'égalité s'excluent mutuellement, étant des concepts hostiles l'un envers l'autre. Par sa nature même, la liberté sape l'égalité sociale, et l'égalité supprime la liberté - car comment pourrait-elle alors être obtenue?" Alexandre Solzhenitsyn, "A Reflection on the Vendee Uprising"

12 avril 2011

La plus ancienne prière connue à la Mère de Dieu (anno 250, manuscrit Ryland)



Un fragment de parchemin, de la taille d'une fiche d'index, trouvé il y a un siècle en Égypte. Il a été daté de 250 après Jésus-Christ, et il contient la plus ancienne prière connue à la Vierge Marie. C'est la prière que nous utilisons à Complies durant le Grand Carême : "Sous ta miséricorde nous cherchons refuge, sainte Mère de Dieu [Theotokos], ne dédaigne pas nos prières dans toutes les épreuves, mais délivre-nous du danger, O toi la seule pure, la seule bénie."
Ce qui est si intéressant dans ce fragment, c'est qu'il date de bien avant les Conciles des années 300 qui nous ont synthétisé le Credo (sans son ajoute vaticane, merci) et le Nouveau Testament. Il est nécessaire pour certains de mes amis qui Protestent encore de regarder l'Histoire de notre Foi en face, telle qu'elle est réellement. Et non pas comment on la leur a racontée. Demander clairement à ceux qui sont vivant aujourd'hui et avec notre Seigneur de prier avec et pour nous est une très ancienne pratique de l'Église.
C'est un peu comme demander à vos amis de prier pour vous. L'Église des origines était *vraiment* convaincue que le Christ avait vaincu la mort. Dès lors les fidèles qui étaient "morts" étaient vivants, et prient tous, là, maintenant, devant le Trône céleste. Il n'y a qu'un voile pour nous séparer, rien de plus. Nous leur demandons de prier, et nous nous demandons les uns les autres de prier. "Je suis le Dieu d’Abraham, le Dieu d’Isaac et le Dieu de Jacob? Ce n’est pas de morts mais de vivants qu’il est le Dieu!" - la Bible parle des défunts saints en tant que vivants, Mt 22,32.

La bibliothèque John Rylands a acheté ce parchemin en 1917. L'apparence est informelle, c'est écrit à la hâte, il y a des fautes d'orthographe, ce n'est pas une feuille sortie d'un livre, plutôt une note prise au vol. Ce qui est surprenant, c'est qu'on y appelle Marie "Théotokos", un terme qu'on pensait ne pas avoir été utilisé avant les débats christologiques des années 400.
khouria Frederica Mathewes-Green


11 avril 2011

Jacob et Esau, la croissance spirituelle vue par les Pères (Dynamis)

DYNAMIS, Croissance spirituelle, 11 avril 2011, lundi de la 6ème semaine du Grand Carême

http://groups.yahoo.com/group/orthodoxdynamis/message/4444


Isaac vieillissait et ses yeux étaient devenus trop faibles pour voir, il appela Ésaü, son fils aîné, et lui dit : "Mon fils!" - "Me voici," répondit-il. Isaac dit : "Tu vois, je suis vieux et je ne sais pas quand je vais mourir. Je t'en prie, prends tes armes, ton carquois et ton arc, va dans la campagne, et tue-moi du gibier. Fais m'en un de ces ragoûts que j'aime, et apporte-le moi, pour que j'en mange et que je te bénisse avant de mourir." Or Rébecca prêtait l'oreille tandis qu'Isaac parlait à son fils Ésaü. Ésaü s'en alla dans la campagne pour tuer et rapporter du gibier. Rébecca dit à Jacob, son fils : "Je viens d'entendre ton père dire à ton frère Ésaü de lui rapporter du gibier et de lui préparer un plat savoureux, afin qu'il le mange et qu'il bénisse ton frère devant le Seigneur, avant de mourir. Écoute-moi donc, mon fils, et suis mes conseils. Va me chercher au troupeau deux beaux chevreaux. J'en ferai pour ton père un plat succulent, comme il l'aime; tu le lui porteras et il en mangera, afin qu'il te bénisse avant de mourir." - "Mais, répondit Jacob à sa mère, Ésaü, mon frère, est velu, et moi je ne le suis pas. Si mon père vient à me palper, je passerai à ses yeux pour un trompeur, et je m'attirerai une malédiction au lieu de la bénédiction." - "Je prends sur moi ta malédiction, mon fils, reprit sa mère. Écoute-moi seulement, et va me chercher ce que je dis." Jacob y alla et apporta les deux chevreaux à sa mère, qui en fit un plat succulent, comme son père les aimait. Elle choisit les plus beaux vêtements d'Ésaü, son fils aîné, qu'elle avait à la maison, et en revêtit Jacob, son fils cadet. Puis elle lui couvrit les mains, ainsi que la partie lisse du cou, de la peau des chevreaux, et lui mit dans la main le plat succulent et le pain qu'elle avait préparés. Jacob se rendit près de son père et lui dit : "Mon père." - "Oui. Qui es-tu, mon fils?" Jacob répondit à son père : "Je suis Ésaü, ton premier-né; j'ai fait ce que tu as demandé. Redresse-toi, je te prie, assieds-toi, et mange de mon gibier, afin que tu me bénisses." - "Comme tu as trouvé vite, mon fils!" - "C'est que le Seigneur ton Dieu m'a fait rencontrer le gibier." - "Approche donc, mon fils, que je te palpe, pour voir si tu es bien mon fils Ésaü." Jacob s'approcha d'Isaac, son père, qui le palpa et dit : "La voix, c'est la voix de Jacob, mais les mains sont les mains d'Ésaü." Il ne reconnut pas, car ses mains étaient velues comme celles de son frère Ésaü. Et il le bénit. "Tu es bien mon fils Ésaü?" Lui dit-il. - "Oui." - "Sers-moi, que je mange de ta chasse, mon fils, et que je te bénisse." Jacob le servit et il mangea; puis il lui présenta du vin, dont il but. Alors Isaac, son père, lui dit : "Approche-toi, mon fils, et embrasse-moi." Comme Jacob s'approchait pour l'embrasser, Isaac sentit l'odeur de ses vêtements, et il le bénit en ces termes : "Oui, l'odeur de mon fils est comme l'odeur d'un champ que le Seigneur a béni. Que Dieu te donne de la rosée du ciel et de la fertilité de la terre, froment et vin en abondance! Que les peuples te servent, et que les nations se prosternent devant toi! Sois le maître de tes frères et que se courbent devant toi les fils de ta mère! Maudit soit qui te maudira, et béni qui te bénira!" À peine Isaac avait-il achevé de bénir Jacob, et celui-ci venait-il de quitter son père, qu'Ésaü rentra de la chasse. Il apprêta, lui aussi, un plat succulent, qu'il apporta à son père en lui disant : "Que mon père se redresse, et mange de la chasse de son fils, afin que tu me bénisses." - "Qui es-tu?" lui demanda son père Isaac. - "Je suis ton fils premier-né, Ésaü." Alors Isaac, en proie à une émotion violente : "Qui est donc, dit-il, celui qui a été à la chasse, et m'a apporté le gibier que j'ai mangé avant que tu reviennes? Je l'ai béni; aussi restera-t-il béni." En entendant ces paroles de son père, Ésaü poussa une clameur pleine d'amertume, et il lui dit : "Bénis-moi aussi, mon père." - "Ton frère, lui répondit-il, est venu surprendre ta bénédiction par ruse." Ésaü dit alors : "Est-ce parce qu'il s'appelle Jacob qu'il vient de me supplanter pour la seconde fois? Il m'a pris mon droit d'aînesse, et voici maintenant qu'il me ravit ma bénédiction!" Il ajouta : "Ne m'en as-tu point réservé une autre?" Isaac lui répondit : "J'ai fait de lui ton maître, et je lui ai donné tous ses frères pour serviteurs. Je l'ai pourvu de froment et de vin. Que puis-je donc faire pour toi, mon fils?" Ésaü dit à son père : "N'as-tu qu'une seule bénédiction, mon père? Bénis-moi aussi, mon père!" Et il se mit à pleurer. Alors Isaac reprit la parole : "voici, dit-il, que ton séjour sera privé de terres fertiles et de la rosée qui descend des cieux. Tu vivras de ton épée tout en servant ton frère, mais si tu te délivres, tu briseras son joug de dessus ton cou." Ésaü prit Jacob en aversion à cause de la bénédiction que lui avait donnée son père, et il dit en son coeur : "Viennent les jours de deuil de mon père, et je tuerai mon frère Jacob." On rapporta à Rébecca les propos de son fils aîné. Elle fit appeler son cadet Jacob et lui dit : "Ton frère Ésaü veut se venger de toi et te tuer."




Croissance spirituelle : Genèse 27,1-42, en particulier le verset 28: "Que Dieu te donne de la rosée du ciel et de la fertilité de la terre, froment et vin en abondance!" En cette dernière semaine du Grand Carême, la lecture de la Genèse met l'accent sur le petit-fils d'Abraham, Jacob, le plus jeune des jumeaux qu'Isaac, fils d'Abraham, a eu avec sa femme Rebbeca (Gn 25,21-23). La personnalité de ces 2 jumeaux était très différente : les saints Pères voient l'aîné, Esaü, comme cédant à la mauvaise sensualité, mais en Jacob, ils ont vu un homme qui croissait dans la relation avec Dieu. Les 2 hommes apportent un riche aperçu de la croissance dans l'Esprit : Esaü nous avertit qu'il vaut mieux étouffer tous les désirs charnels, et Jacob révèle comment entrer dans une manière spirituelle de vivre, et à passer le restant de notre vie dans la paix et la repentance.

Si on tire la péricope suivante hors du contexte historique de Jacob et Esaü, on pourrait facilement en conclure qu'Esaü a été victime d'une grave injustice, du fait du complot de Rebecca et Jacob. Cependant, les Pères lisent ce passage en contexte. D'où Origène faisait remarquer que "le complot d'Esaü contre Jacob a comme prétexte apparent de reprendre la bénédiction. Mais avant cela, l'âme d'Esaü avait des 'racines' dans l'immoralité et l'impiété." L'évidence de l'affirmation d'Origène se voit dans la lecture de ce jour, Esaü en colère décidant pour finir de commettre un meurtre (Gn. 27,41-42).

En parlant d'Esaü, l'Apôtre Paul met le fidèle en garde : "Veillez à ce que personne ne laisse passer la grâce de Dieu, à ce que ne surgisse aucune racine d'amertume capable de troubler et de contaminer la masse d'entre vous. Qu'il n'y ait parmi vous ni sensuel ni profanateur comme Ésaü [..]" (Héb. 12,15-16). Après tout, notre Seigneur nous demande de banir tout désir charnel. Et l'Apôtre ajoute : "Bannissez du milieu de vous toute espèce d'aigreur, d'emportement, de colère, de cri, d'injure, ainsi que toute méchanceté" (Eph. 4,31).

Dissertant sur le complot de Rebecca et Jacob, les Pères y ont vu la métaphore d'une croissance spirituelle. Tout comme Esaü et Jacob sortaient du même sein de Rebecca, le mal et le bien proviennent de la même source – nos âmes. Ce qui faisait dire à saint Ambroise de Milan que, comme Rebecca, nous devrions répudier les mauvais rejetons de nos coeurs et veiller à ce que ".. la bonté soit favorisée et renforcée." Ainsi, pleurant sur nos péchés, et nous détournant de l'Esaü qui est en nous, prions Dieu le Saint Esprit de nous assister de lutter avec une ferme résolution comme Jacob, de sorte que nous accomplissions toujours ce qui est agréable à Dieu et Lui apportions toujours louange et gloire. Décidons-nous à oeuvrer activement à la bonté. Alors, comme disait Saint Nicétas Stéthatos, nous serons ".. à la ressemblance (de Dieu) si nous possédons la vertu et la compréhension car 'Sa vertu couvre les Cieux' (Hab. 3,3)".

Il y a 2 aspects à l'effort requis pour la croissance spirituelle : nous débarasser des passions pécheresses, et faire nôtres les vertus. Dans le Grand Canon, saint André de Crète nous enseigne à nous encourager nous-mêmes : "Tu as imité le détestable Esaü, ô mon âme, tu as vendu ton droit d'aînesse, le droit de ta beauté originelle, à celui qui cherchait à te supplanter, et ainsi tu as été privée de la bénédiction Paternelle." Nous savons très facilement perdre la ressemblance de Dieu qui est marquée en nous; cependant, par la grâce de Dieu reçue dans les saints Mystères de la Confession et de la Communion, nous pouvons récupérer cet inestimable trésor.

Nous perdons l'héritage de notre Père Céleste par nos péchés. Saint André dit "aussi, fais pénitence." Dès lors, passons le restant de notre vie dans la paix et la repentance, et recouvrons l'état qui nous était originellement dévolu. Après avoir perdu la bénédiction, Esaü se mit à plaider sa cause car il voulait hériter de la bénédiction, mais il fut repoussé. Comme dit l'Apôtre il "[..] ne put amener son père à se repentir de ses paroles, encore qu'il l'en suppliât tout en larmes" (Héb. 12,17). Cependant, en Christ, la véritable repentance, la purification de nos péchés, et la restauration en Dieu sont à nouveau possibles.

Ô Seigneur, accepte la poussière de notre repentance, et par Ta grâce, accorde-nous le Ciel.



La Réconciliation de Jacob et Esaü (de longues années après!)



10 avril 2011

Introduction à la Prière de Jésus (princesse Ileana de Roumanie / abbatissa Alexandra)


Mère Alexandra, abbesse / abbatissa / higoumena
Ileana, Princesse de Roumanie, 1909-1991

La princesse Ileana était la fille du roi Ferdinand et de la reine Marie de Roumanie. Après s'être mariée et avoir élevé 6 enfants, elle est rentrée comme novice au monastère du Voile à Bussy-en-Otte, France, en 1961. Elle y fit profession monastique en 1967, et plus tard dans l'année, elle fonda le monastère de la Transfiguration à Ellwood City, Pennsylvanie, le premier monastère anglophone pour femmes aux États-Unis d'Amérique. Elle s'endormit dans le Seigneur le 21 janvier 1991, et est enterrée dans le monastère qu'elle a fondé.


http://www.deathtotheworld.com/writings/writings/princessileana/introtojesusprayer.html


INTRODUCTION À LA "PRIÈRE DE JÉSUS"
par son altesse royale la princesse Ileana de Roumanie


Seigneur Jésus-Christ, Fils de Dieu, aie pitié de moi, pécheur.

J'ai souvent lu la Prière de Jésus dans des livres de prière, et l'ai entendue à l'église, mais mon attention n'a été attirée sur elle qu'il y a quelques années, en Roumanie, dans un petit monastère à Sâmbata, blotti au pied des Carpathes, au coeur d'une profonde forêt, avec sa petite église blanche qui se reflète dans une étendue d'eau montagneuse claire comme le cristal. J'y avais rencontré un moine qui pratiquait "la prière du coeur." Une paix profonde et un grand silence régnaient à l'époque à Sâmbata. C'était un lieu de repos et de force – je prie Dieu qu'il en soit toujours ainsi.



J'ai parcouru bien du chemin depuis que j'ai été à Sâmbata, et depuis lors la Prière de Jésus repose en mon coeur comme un précieux don. Elle y était restée inactive jusqu'il y a quelques années, jusqu'à ce que je lise le "Récit du Pèlerin Russe." Depuis lors, j'ai cherché à la pratique continuellement. Parfois je la manque; néanmoins, la prière a ouvert en mon coeur et en mon âme d'incroyables panoramas.

La Prière de Jésus, ou Prière du Coeur, se centre sur le Saint Nom. On peut la dire en entier, "Seigneur Jésus-Christ, Fils de Dieu, aie pitié de moi, pécheur." On peut changer en "de nous, pécheurs," ou nommer quelqu'un, ou elle peut être abrégée. Sa puissance se trouve dans le Nom de Jésus. Ainsi, "Jésus" pourrait, seul, suffire à combler celui qui prie.

Cette prière remonte au Nouveau Testament, et a une longue tradition d'utilisation. La méthode de contemplation basée sur le Saint Nom est attribuée à saint Syméon, appelé "le Nouveau Théologien" (949-1022). A l'âge de 14 ans, saint Syméon a eu la vision d'une lumière céleste, qui lui a donné la sensation d'être séparé de son corps. Surpris, et rempli d'une joie inexprimable, senti une humilité consummante s'emparer de lui, et il s'écria, empruntant la prière du Publicain (Lc 18,13) "Seigneur Jésus, aie pitié de moi." Bien après que la vision eu disparue, cette grande joie revint à saint Syméon à chaque fois qu'il répéta la prière, et il enseigna à ses disciples de prier de la même manière. La prière évolua vers sa forme plus complète : "Seigneur Jésus-Christ, Fils de Dieu, aie pitié de moi, pécheur." C'est sous cette forme qu'il nous est arrivé à travers des générations et générations de pieux moines et laïcs.

L'invocation du Saint Nom n'est pas une exclusivité de l'Église Orthodoxe, mais est aussi utilisée par des catholiques-romains, des anglicans, et des protestants, quoiqu'à un moindre degré. Sur le Mont Sinaï et sur le Mont Athos, les moines ont tout un schéma de contemplation basé sur cette simple prière, pratiquée dans un complet silence. Ces moines sont appelés les hésychastes.

Saint Grégoire Palamas (1296-1359), le dernier parmi les grands Pères de l'Église, est devenu le grand promoteur des hésychastes. Il gagna, après une longue et difficile bataille, une place incontestable pour la Prière de Jésus et l'hésychasme dans l'Église. Au 18ème siècle, lorsque tsarisme frappa durement le monachisme en Russie, et que les Turcs écrasèrent l'Orthodoxie en Grèce, le monastère de Neamtzu en Moldavie (Roumanie) devint un des grands centres de la Prière de Jésus.

Cette Prière est tenue pour être magnifiquement spirituelle car elle se concentre pleinement sur Jésus: toutes les pensées, les efforts, les espoirs, la foi et l'amour sont répandus en dévotion à Dieu le Fils. Cela accompli 2 directions basiques du Nouveau Testament. Dans l'une, Jésus dit : "Je vous le dit, tout ce que vous demanderez au Père en Mon Nom, Il vous le donnera. Jusqu'à présent, vous n'avez rien demandé en Mon Nom : demandez, et vous recevrez, afin que votre joie soit complète" (Jn 16,23-24). Dans l'autre, nous avons l'invitation de saint Paul à prier sans cesse (1 Thess. 5,17). De plus, elle suit les instructions du comment prier données par Jésus (qu'Il donna à Ses disciples lorsqu'Il leur apprit le Notre Père) : "quand tu prie, retire-toi dans ta chambre la plus haute, ferme ta porte, et prie ton Père qui est dans le secret, et ton Père qui te voit dans le secret te récompensera grandement" (Mt 6,6).
Et Jésus a enseigné que toute inspiration, bonne ou mauvaise, provient du coeur de l'homme : "L’homme bon, du bon trésor de son coeur, tire ce qui est bon, et celui qui est mauvais, de son mauvais fond, tire ce qui est mauvais; car c’est du trop-plein du coeur que parle sa bouche" (Lc 6,45).

Sur ces préceptes-là, ainsi que beaucoup d'autres du Nouveau comme de l'Ancien Testament, les saints Pères, déjà bien avant saint Syméon, se sont basés pour une prière fervente et simple. Ils ont développé une méthode de contemplation dans laquelle la prière incessante devient aussi naturelle que la respiration, suivant la cadence du rythme cardiaque.

Toutes les voies qui mènent à Dieu sont parsemées d'embûches, car l'ennemi, satan, essaie toujours de nous faire chuter. Il attaque naturellement le plus fort lorsque nous sommes bien en chemin vers notre Salut, car c'est bien ce qu'il s'efforce le plus d'empêcher. Dans la prière mystique, les tentations que nous rencontrons dépassent toutes les autres en termes de danger. Car nos pensées se situent à un niveau plus élevé, d'où les illusions deviennent plus subtiles. Quelqu'un a dit que "la mystique a commencé dans le brouillard et s'est achevée dans le schisme." Cette remarque cynique, qui vient d'un incroyant, comporte cependant une part de vérité. La mystique n'est de valeur réelle que lorsqu'elle est pratiquée avec une absolue sobriété.

A une certaine époque, une controverse a éclaté à propos de certains hésychastes, qui avaient chuté et pratiquaient des actes de piété et de jeûne excessifs, car ils avaient perdu le sens de la modération, à propos duquel l'Église accorde une si grande importance. Nous ne devons pas nous arrêter aux mauvais usages de la Prière de Jésus, sinon pour réaliser que toutes les exagérations sont nuisibles, et que nous devrions toujours pratiquer avec retenue. "La pratique de la Prière de Jésus est la forme traditionnelle pour accomplir l'injonction de l'Apôtre Paul à 'prier sans cesse': elle n'a rien à voir avec le mysticisme qui est l'héritage d'un passé païen."

L'Église Orthodoxe est empreinte d'une profonde vie mystique, qu'elle garde et renforce de la solidité de ses règles traditionnelles. C'est pourquoi ses mystiques s'égarent rarement. "La 'vie ascétique' est une vie dans laquelle prévalent les vertus 'acquises', c-à-d les vertus résultant d'un effort personnel, uniquement accompagné de la grâce générale que Dieu accorde à toute bonne volonté. La "vie mystique" est une vie dans laquelle les dons de l'Esprit Saint prédominent sur les efforts humains, et dans laquelle les vertus "infuses" prédominent sur les vertus "acquises." L'âme est devenue plus passive qu'active. Prenons une comparaison classique. Entre la vie ascétique, c-à-d la vie dans laquelle l'action humaine prédomine, et la vie mystique, c-à-d la vie dans laquelle l'action de Dieu prédomine, il y a la même différence qu'entre un bateau à rames et un bateau à voiles. La rame est l'effort ascétique, la voile est la passivité mystique qui est déployée pour attraper le vent divin. La Prière de Jésus est le coeur de la prière mystique, et elle peut être utilisée par tout un chacun, à n'importe quel moment. Il n'y a rien de mystérieux en elle – ne confondons pas mystérieux et mystique. Nous commençons en suivant les préceptes et exemples fréquemment donnés par notre Seigneur. Tout d'abord, un endroit calme - "Venez vous-mêmes à l’écart, dans un lieu désert, et reposez-vous un peu" (Mc 6,31); "mettant votre honneur à vivre calmes" (1 Thess 4,11). Puis priez en secret – seul et en silence.

Je pense qu'il serait utile que j'explique "prier en secret, seul et en silence."
"Secret" doit être comprit comme il est utilisé dans la Bible : par exemple, Jésus nous dit de donner la charité secrètement – que la main gauche ignore ce que donne la droite. Nous ne devrions pas faire étalage de nos dévotions, ni nous en vanter.
"Seul" signifie de nous séparer de notre environnement immédiat et des influences qui perturbent. Cependant, nous ne sommes en réalité jamais aussi bien entourés que lorsque nous prions ".. enveloppés que nous sommes d’une si grande nuée de témoins.." (Héb. 12,1). Les témoins sont tous ceux qui prient: les Anges, Archanges, saints et pécheurs, les vivants et les morts. C'est dans la prière, en particulier la Prière de Jésus, que nous devenons particulièrement conscients d'appartenir au Corps vivant du Christ.
"En silence", cela veut dire que nous n'exprimons pas notre prière de manière audible. Nous ne méditons pas non plus sur les paroles, nous les utilisons simplement pour aller au delà d'elles, vers l'essence en elle-même.

Ce n'est pas facile, avec nos vies surchargées, et pourtant on peut y parvenir – chacun d'entre nous peut arriver à trouver quelques minutes pendant lesquelles utiliser une prière qui n'est composée que de quelques paroles, ou même d'un seul mot. Cette prière devrait être répétée paisiblement, sans se hâter, consciemment. Chaque pensée devrait être concentrée sur Jésus, oubliant tout le reste, tant les joies que les peines. Toute pensée qui égare, même bonne ou pieuse, peut devenir un obstacle.

Quand vous embrassez quelqu'un qui vous est cher, vous ne vous arrêtez pas pour méditer sur le comment et le pourquoi vous aimez – non, vous aimez du fond du coeur, tout simplement. Il en est de même lorsque nous embrassons spirituellement le Christ Jésus dans notre coeur. Si nous nous attardons à examiner la profondeur et la qualité de notre amour, cela veut dire que nous nous préoccupons de nos propres réactions, plutôt que de nous donner sans réserve à Jésus – sans rien retenir. Pensez à la prière comme à la respiration, inspirer, expirer; calmez l'esprit et le corps, utilisant le battement du coeur comme rythme. Ne cherchez pas des paroles, mais répétez la Prière, ou rien que le Nom de Jésus, avec amour et adoration. C'EST TOUT! Étrange – tout et bien plus se trouve dans ce tout petit peu!

Il est bon d'avoir des heures régulières pour la prière, et de se retirer à chaque fois que possible dans la même pièce ou au même endroit, si possible devant une Icône. L'Icône est chargée de la présence objective de Celui qui y est dépeint, et dès lors nous assiste grandement dans notre invocation. Les moines et moniales Orthodoxes trouvent qu'utiliser un chapelet (tchotki / komboschini) peut aider à garder l'attention fixée. Ou vous pouvez trouver plus approprié de fermer calmement vos yeux – vous concentrant vers l'intérieur.

La Prière de Jésus peut être utilisée pour le culte comme pour la prière de demande; pour l'intercession, l'invocation, l'adoration, et l'action de grâce. C'est un moyen par lequel nous déposons tout ce qui est en nous, à la fois pour Dieu et l'homme, aux pieds de Jésus. C'est un moyen de communion avec Dieu et avec tous ceux qui prient. Le fait que nous puissions entraîner notre coeur à prier même lorsque nous dormons, nous garde de manière ininterrompue dans la communauté de prière. Ce n'est pas une affirmation en l'air; nombreux ont expérimenté ce fait vivifiant. Bien entendu, nous ne saurons pas atteindre cette continuité de prière dès le départ, mais c'est accessible; car pour tout ce qui vaut la peine d'être entrepris, nous devons "… courir avec constance l'épreuve qui nous est proposée" (Héb. 12,1).

J'ai reçu une preuve éclatante de la communion ininterrompue avec tous ceux qui prie lorsque récemment j'ai subi une intervention chirurgicale. Je suis restée longtemps sous anesthésie. "Jésus" avait été ma dernière pensée consciente, et le premier mot que j'ai prononcé lorsque je me suis réveillée. C'était merveilleux, indescriptible, de bien que je ne savais pas ce qui se passais à propos de mon corps, je n'ai jamais perdu conscience qu'on priait pour moi et que je priais pour moi-même. Après une telle expérience, plus personne ne s'étonnerait qu'il y ait de grandes âmes qui consacrent leur vie exclusivement à la prière.

La prière a toujours été de très grande importance pour moi, et l'habitude que j'ai acquise pendant mon enfance de prier matin et soir ne m'a jamais quittée; mais dans la pratique de la Prière de Jésus, je ne suis qu'une débutante. J'aimerais cependant, comme pour susciter l'intérêt pour cette prière, parce que si je n'ai fait que toucher la frange du vêtement céleste, je l'ai touchée. Et la joie est si grande que j'aimerais la partager avec autrui. Ce n'est pas vraiment la manière de prier habituelle; vous pourriez ne pas y retrouver la joie que moi j'y trouve, car votre chemin pourrait être bien différent – et pourtant aussi gratifiant.

Dans la crainte et dans la joie, dans la solitude et en compagnie, elle est toujours avec moi. Pas seulement dans le silence des dévotions quotidiennes, mais en tout temps et en tout lieu. Elle transforme pour moi les visages tristes en sourires; elle magnifie, comme si on avait enlevé un film protecteur d'une vieille photo et que la couleur apparaissait alors claire et nette, comme la nature un chaud jour de printemps après une petite averse. Même le désespoir s'en retrouve atténué, et la repentance est parvenue à son but.

Lorsque je me lève au matin, elle m'introduit dans la joie au jour nouveau. Lorsque je voyage par air, terre ou mer, elle chante en moi. Lorsque je suis sur une estrade à faire face à mes auditeurs, elle est un encouragement rythmé. Lorsque je rassemble mes enfants autour de moi, elle murmure une bénédiction. Et à la fin d'une journée bien chargée, lorsque je me couche pour me reposer, je donne mon coeur à Jésus : "(Seigneur), entre Tes mains je remet mon esprit." Je dors – mais tout en battant, mon coeur prie : "JÉSUS."



Princesse Ileana de Roumanie - née à Bucarest 23/12/1908 - + Ellwood City (USA) 21/1/1991



ses écrits (traduction anglaise)
http://www.tkinter.smig.net/PrincessIleana/index.htm


livre :


http://www.conciliarpress.com/royal-monastic-princess-ileana-of-romania.html




Le tsarévitch & futur martyr saint Alexei Romanov, avec Nicolas et Ileana de Roumanie, vers 1915



Princesse Ileana à Balcic




Princesse Ileana, à l'hôpital du "Coeur de la Reine"


photos extraites de cette très riche photothèque :
http://www.tkinter.smig.net/PrincessIleana/Gallery/index.htm