Sainte Bathilde, reine puis veuve, moniale & diaconesse
(Bathildis, Bathild, Baldechilde, Baldhild, Bauteur)
Née au Ciel le 30 janvier 680.
Bathilde, comme saint Patrick, avait été esclave. Née Anglo-Saxonne, elle fut capturée en 641 par des pirates Danois, et vendue à Erchinoald, le maire du palais de Clovis 2, roi des Francs. Elle en gagna vite les faveurs, car elle avait charme, beauté, et une nature gracieuse et douce. Elle gagna aussi l'affection de ses compagnons de servitude, car elle était serviable envers eux aussi, nettoyant leurs chaussures, réparant leurs vêtements, et son tempérament radieux et attirant la rendait chère à tous.
Le ministre, attiré par ses belles qualités, souhaita en faire sa femme, mais Bathilde, effrayée à l'idée, se déguisa avec des vieilles loques et se cacha parmi les serviteurs de rang inférieur dans le palais; et lui, ne la trouvant plus à sa place habituelle dans ce palais de Soissons - capitale des Francs à l'époque -, il pensa qu'elle s'était enfuie, et se maria avec une autre femme.
Son prétendant suivant, cependant, ne sera rien de moins que le roi en personne, car lorsqu'elle se débarassa de ses vieilles hardes et reprit sa place, il remarqua sa grâce et sa beauté, et lui déclara sa flamme. En réalité, c'est le maire de palais Archimbaut qui, voulant conserver son pouvoir et connaissant les penchants de son roi, lui présenta la jeune femme... Ainsi donc, en 649, l'esclave de 19 ans, Bathilde, devint reine des Francs. Elle mit 3 fils au monde pour Clovis : Clotaire 3, Childéric 2 et Thierry 3 - qui tous deviendront rois. A la mort de Clovis (vers 655-657, mort jeune après être devenu fou), elle fut nommée régente au nom de son fils aîné, qui n'avait que 5 ans, et dirigea avec compétence durant 8 ans, avec saint Eloi (1er décembre) pour conseiller personnel.
Ce fut une excellente reine et une dirigeante avisée. Contrairement à beaucoup d'entre ceux qui accèdent soudainement à une haute place et grande fortune, elle n'oublia jamais qu'elle avait été esclave, et fit tout ce qui était en son pouvoir pour libérer ceux vivant en captivité.
Tout en régnant, elle partagea le royaume entre ses 3 jeunes fils, l'aîné Clotaire recevant le siège principal à savoir la Neustrie, Childéric l'Austrasie, et Thierry la Bourgogne.
On nous rapporte que "la reine Bathilde était la plus sainte et pieuse des femmes; sa pieuse munificence ne connaissait pas de bornes; se souvenant de son propre esclavage, elle utilisa de grandes sommes pour le rachat de captifs." Bathilde aida à promouvoir le Christianisme en secondant le zèle de saint Ouen (24 août), saint Léodegaire (2 octobre) et de nombreux autres évêques.
A cette époque, les plus pauvres habitants des pays Mérovingiens étaient souvent obligés de vendre leurs enfants comme esclaves, afin de payer les taxes qui les écrasaient - la tristement célèbre "capitation". Bathilde réduisit ces taxes, interdisit d'acquérir des esclaves Chrétiens et la vente de sujets de son royaume, et déclara que tout esclave posant le pied sur le sol de son pays serait dès cet instant libre. C'est ainsi que cette lumineuse femme gagna l'amour de son peuple et fut une pionnière dans l'abolition de l'esclavage. Cela ne lui valut pas une grande popularité parmi les riches...
Un écrivain Anglais contemporain, Eddius (le biographe de saint Wilfrid) prétend que la reine Bathile fut responsable de l'assassinat politique de l'évêque saint Annemond (Dalfinus) de Lyon (28 septembre) et de 9 autres évêques. Ce qui a réellement eu lieu est fort obscur, l'époque étant troublée, et il est totalement improbable que Bathilde soit coupable de ce crime. Parmi les décisions de sainte Bathilde, fidèle enfant spirituelle de saint Éloi, il y avait la sanction contre la simonie, interdisant aux évêques de percevoir des revenus pour les sacrements accomplis. Elle avait aussi fait interdire la pratique qui valait que les rejetons des nobles touchent une partie des revenus des abbayes. Vu les moeurs de l'époque, elle n'a pas dû que se faire des amis, y compris parmi tous ceux qui devaient leur siège épiscopal non pas aux grandes écoles monastiques "colombaniennes", mais au "fait du prince" dont souvent ils étaient un parent. Sa volonté à voir un clergé conforme à la Foi lui aura donc valu bien des calomnies. Le plus probable est que le coupable était le très cruel et peu chrétien maire de palais de son fils, Ebroïn, à la réputation épouvantable historiquement établie, qui n'hésitait pas à persécuter l'Église, et c'est de sa propre initiative que cet terrible meurtre aura eu lieu.
Sainte Bathilde fonda aussi nombre d'abbayes sous la Règle de saint Colomban, telles que Corbie, Saint-Denis et Chelles, qui devinrent des implantations de civilisation dans des régions éloignées et sauvages, habitées seulement de loups rôdant et autres bêtes féroces. Sous sa direction, les forêts et les terres en friches furent regagnées, des champs et des paturages prennant la place, et l'agriculture devint florissante. La Gaule se relevait à peine de grandes invasions qui avaient ramené sa population de 8 à 5 millions.. Suite à toutes ces invasions, le nord de la Gaule était largement déchristianisé, et les évêques missionnaires avaient beaucoup de travail pour tout relever. On trouve quantité de saintes femmes auprès de piètres rois, à cette époque, saintes qui toutes épauleront le mouvement missionnaire, souvent au péril de leur vie.
Elle fit construire des hôpitaux publics et vendit ses bijoux pour venir en aide aux nécessiteux. Mais tout cela aussi la rendait détestable aux yeux des grands du royaume. Avant de se cloîtrer à Chelles, Bathilde n'avait pas su empêcher le maire du palais Ebroïn de dominer par ses intrigues, contre les avis de saint Léger d'Autun, conseiller de la reine. Ce fut Ebroïn qui parvint à gouverner et poussera la reine à se retirer. Par là même, s'ouvrira cette terrible période de luttes intestines du royaume franc, qui s'achèvera avec l'arrivée de Charles Martel et ses Carolingiens.
Pour finir, lorsque Clotaire fut en âge de règner, elle fut donc forcée à se retirer (et sous escorte militaire!) dans sa propre abbaye royale de Chelles, à Lagny, près de Paris, où elle servit les autres moniales avec humilité et obéissance envers l'abbesse, comme si elle était la moindre des soeurs. Elle était tellement détestée des "grands" qui se souciaient très peu du bien du peuple et de l'unité du royaume, qu'elle ne sortit plus du monastère même après le début des conflits entre les royaumes de ses fils. L'assassinat d'un de ses conseillers et ami évêque lui fut un sérieux avertissement.
Peu après son arrivée au monastère, elle s'occupa des funérailles de son père spirituel, saint Éloi, qui l'avait avertie en songe de s'empresser de quitter les affaires de ce monde. Rapidement, des filles de familles influentes ou de la noblesse comme sainte Hereswithe d'Angleterre, arrivée en 655 et sa soeur sainte Hilde (614-680), ou sainte Mildred de Kent (+ 732) fondatrices d'abbayes en Angleterre, vinrent à Chelles, qui rayonnait tant spirituellement qu'au niveau de la civilisation mérovingienne.
Elle mourrut à Chelles avant d'avoir atteint ses 50 ans. La mort la toucha délicatement; étant occupé à mourrir, elle dit qu'elle vit une échelle montant de l'Autel jusqu'au ciel, et elle y grimpa en compagnie des Anges.
Selon certains auteurs, comme moniale, elle aurait été ordonnée diaconnesse. C'est tout à fait plausible, car cela aurait été une manière de la rendre intouchable aux yeux d'une partie importante des dirigeants mérovingiens qui la détestaient mais n'auraient pas osé lever la main sur un membre du clergé. Et une telle ordination "de protection" avait aussi été faite par saint Médard pour sainte Radegonde.
Sa sainteté fut reconnue de son vivant, son culte fut même étendu au diocèse de Rome par l'évêque et pape Nicolas Ier (858-867). L'essentiel de ses saintes reliques repose toujours à l'église Saint-André de Chelles, le restant se trouvant à l'abbaye de Jouarre, et à la cathédrale de Meaux.
Sa Vie fut écrite par un contemporain. Le monastère de Chelles avait beaucoup de contacts avec l'Angleterre anglo-saxonne, ce qui amena à répandre son culte dans les Îles Britaniques.
On dépeint généralement Sainte Bathilde en reine couronnée, ou en moniale devant l'Autel de la Vierge Marie, 2 Anges supportant un Enfant sur une échelle (cette échelle étant aussi un jeu de mot sur le nom du monastère, Chelles), et aussi avec la vision qu'elle dit avoir eu de sa mort. On peut aussi la représenter :
(1) tenant un balai, rappel de son ancien esclavage;
(2) donnant l'aumône ou du pain;
(3) portant un modèle de l'abbaye de Chelles (Roeder, White).
Elle est la sainte patronne des enfants (Roeder).
Tunique ou "chasuble" de sainte Bathilde, Musée municipal "Bono" à de Chelles. Cette sorte de chasuble était placée dans son cercueili, et par son style de couture, elle imite les brodures de bijoux helléniques. Réalisé en soie sur lin.
Source
Voir à ce sujet (en allemand) "Brettchenweben"
Tropaire de sainte Bathilde, ton 6
Vendue comme esclave n'étant encore que petite fille,*
Tu devins par la suite l'épouse du roi Clovis II et la reine des Mérovingiens.*
Devenue régente après la mort de ton époux terrestre,*
Tu fis abolir l'esclavage et tu fonda nombre de monastères et d'hôpitaux publics. *
Fidèle aux enseignements de nos saints pères Éloi et Ouen, *
Quand ton fils devint roi, tu te fis moniale à Chelles. *
Sainte Bathilde, prie Dieu pour notre salut !
Voir aussi + source icône:
http://orthodoxologie.blogspot.be/2011/05/sainte-bathilde-moniale-de-chelles-et.html
A (re)lire aussi, ce texte de 2007 :
Saintes Aldegonde, Bathilde, Martine & les 3 saints Docteurs
http://stmaterne.blogspot.com/2007/01/saintes-aldegonde-bathilde-martine-les.html
Sacramentaire de Ratoldus, abbé de l'abbaye royale de Corbie (dit "grégorien", en réalité de type "gélasien"), anno 975, réédition latine, texte critique & notes :
http://www.boydellandbrewer.com/store/viewItem.asp?idProduct=11738
Collégiale de l'ancienne abbaye de Corbie, fondation de sainte Bathilde. Un trésor de saintes reliques s'y trouve exposé sur tout le pourtour intérieur de l'église!
Carte routière depuis la paroisse des saints Anargyres à Péronnes-lez-Binche (B) jusqu'à la collégiale Saint-Etienne à Corbie (F)
Source ("couture de saints patrons sur vêtements")